Le jour de notre mort (Paul Helm)

On dit souvent que, dans toutes ses dimensions, la vie humaine est le don de Dieu. Si tel est le cas, la décadence et la mort sont le retrait de ce don. C’est ce qu’enseignent les Écritures : Dieu donne la vie et il la reprend. La durée de notre vie sur la terre est le don de Dieu pour chacun de nous. Il n’existe donc pas de durée de vie « naturelle » comme il existe un moyen naturel de naître, car la mort n’est pas simplement le lent déclin de la vie qui nous affecte tous. Nous pouvons parler de durée naturelle de vie en termes statistiques, et les compagnies d’assurance sont capables de conseiller leurs clients en se référant à l’espérance de vie actuelle, mais il s’agit d’une moyenne et cette durée de vie est très variable dans la réalité. S’il est possible de prédire la date de la naissance avec plus ou moins de précision, personne ne peut prédire le jour de la mort. Un individu ayant atteint l’âge limite « normal » de l’espérance de vie peut soudain guérir de manière inattendue, et une personne en bonne santé peut soudain s’écrouler et succomber.

La Bible part souvent de ces lieux communs sur la vie et la mort pour aborder le sujet de la mort et du fait de mourir afin de proposer sa compréhension unique du sujet. Paradoxalement, la mort est à la fois certaine et totalement imprévisible. Elle se produira certainement, mais nous connaissons rarement à l’avance le moment où elle survient et la manière dont elle se manifeste. 

L’approche biblique repose sur trois éléments

1. La mort peut être soudaine et inattendue

Nous avons déjà vu cela. La parabole de Christ à propos de l’homme prospère qui prévoyait d’agrandir ses greniers en est un exemple frappant (Luc 12:18). Jésus établit un contraste entre la sécurité que l’homme entrevoyait pour de nombreuses années et le fait que son âme lui serait redemandée cette nuit même, avant qu’il ait la moindre chance de changer son attitude ou de forger d’autres projets. L’homme échafaudait ses plans sans prendre en compte la possibilité de sa mort et sans se préoccuper le moins du monde de son avenir éternel ou de la relation de son âme avec Dieu. Les Écritures mettent également en garde contre ceux qui disent : « Paix et sûreté ! », alors qu’une ruine soudaine est sur le point de les atteindre (1 Thessaloniciens 5:3).

Certains diront que souligner ces aspects de l’enseignement biblique relève de la morbidité, mais ces gens ont subi l’influence de la culture moderne et pris l’habitude de remettre à plus tard la pensée de leur mort. Une telle attitude n’est pas le propre de notre époque, mais elle caractérise en tout temps ceux qui se préoccupent de la vie présente au point de quasiment occulter ce qui vient ensuite. On peut comprendre cette attitude quand on considère le caractère désagréable du fait de mourir et le mystère qui entoure la mort (souvent alimenté par la pensée agnostique).

Dans les faits, de telles personnes pensent qu’elles vivront éternellement (Psaume 49:12). Elles ne le formulent pas ainsi, mais leur comportement en dit plus long que leurs paroles.

2. Généralement, les hommes écartent de leur esprit la pensée de leur mort

S’il leur arrive d’y penser, ils y voient la limite ultime des espoirs et des projets humains, la fin des plaisirs de l’homme. C’est pour cela que nos semblables s’exclament souvent : « Mangeons et buvons, car demain nous mourrons » (1 Corinthiens 15:32). Profitez de la vie, la mort vient plus tard que vous ne le pensez.

3. Nous sommes appelés à nous préparer à la mort

Cela ne concerne pas seulement la question de mettre nos affaires en règle, mais aussi de nous préparer à la vie après la mort. À première vue, cela paraît totalement absurde. Se préparer à la mort au milieu de la vie ? Mais vivre en se préparant à la mort ne signifie pas vivre avec un pied déjà dans la tombe, comme si nous étions déjà à moitié morts. Cela signifie plutôt reconnaître que la vie a une durée naturelle, qu’à l’âge de trente-cinq ans l’homme a parcouru environ la moitié de sa vie terrestre, etc. 

Le grand psaume de Moïse (90) établit un contraste entre l’intemporalité du Dieu éternel et la vie fragile et éphémère de l’homme. En gardant ce contraste à l’esprit, le psalmiste demande à Dieu de lui enseigner, à lui et à son peuple, à bien compter leurs jours afin d’appliquer leur cœur à la sagesse (v.12). Il prie que son peuple puisse prendre conscience du temps qui passe afin de réagir en conséquence. Mais agir de manière appropriée ne signifie pas vivre comme si nous étions déjà presque morts, en nous complaisant dans l’apathie, le fatalisme et l’inertie. Il s’agit de répondre au mieux à notre appel, en faisant plein usage du temps qui nous est imparti. Il y a donc une différence fondamentale entre l’attitude qui consiste à dire : « Je vais mourir bientôt ; il ne vaut pas la peine d’essayer de faire quoi que ce soit », et celle qui dit : « Je vais mourir bientôt ; il faut que je vive pleinement chaque jour. »

« Vivre chaque jour comme si c’était le dernier », ne signifie pas être paralysé mais avoir conscience des limites de nos activités car bientôt, peut-être plus tôt que nous l’imaginons, nous entrerons dans l’éternité. Pour reprendre les paroles de la sagesse soigneusement pesées de l’Ancien Testament, cela consiste à faire tout ce que notre main trouve à faire, en nous rappelant que tous nos projets et leur mise en œuvre doivent cesser au jour de la mort (Ecclésiaste 9:10).

Nous avons affirmé plus tôt que la vie est le don de Dieu et que la mort est le retrait de ce don. Beaucoup d’hommes sont horrifiés à cette idée : comment Dieu peut-il retirer le don de la vie à tant de personnes dans des circonstances clairement injustes ? Certains expérimentent une mort violente ou, à l’opposé, une lente agonie. D’autres meurent au bout de seulement quelques années. Comment se fait-il que certains jouissent d’une longue vie, gratifiante et agréable, alors que pour d’autres elle n’est que courte et misérable ? Il est parfois possible de se hasarder à apporter une réponse à cette question, mais nous aboutissons toujours au caractère impénétrable des voies de Dieu. En définitive, les choses sont ce qu’elles sont parce que telle est la volonté de Dieu, et les Écritures affirment que ses voies sont entièrement justes (Psaume 89:15). Dieu fait toutes choses pour des raisons qui sont parfaitement conformes à son caractère, mais ces raisons nous sont cachées.

Tout ceci est simplement une autre manière de dire que chacun de nous se trouve entre les mains de Dieu, et c’est précisément ce qu’enseignent les Écritures. Notre vie ne nous appartient pas. Nous n’avons pas choisi d’exister et nous ne pouvons pas prolonger le temps que notre Créateur nous a imparti, ne serait-ce que d’une seconde (même si nous croyons le contraire parfois). Ces observations peuvent sembler être des lieux communs, de simples mots, mais les Écritures affirment qu’il est essentiel de réfléchir à ces vérités et de vivre à leur lumière. Cela fait partie de la piété authentique.


Cet article est tiré du livre : Les choses dernières de Paul Helm