Le croyant devrait-il souhaiter mourir ? (Paul Helm)

La question de la mort et de mourir soulève beaucoup de problèmes complexes : la difficulté de faire consciemment face à la mort, la manière dont la souffrance et les traitements médicaux affectent la personnalité, la relation entre le mourant ou sa famille et ses amis, la question de savoir ce qui doit être ou non révélé sur sa condition médicale, et le problème (non des moindres) de la foi et de l’assurance. À ceux-là s’ajoute la difficulté d’apporter le message chrétien à ceux qui meurent sans connaître Christ, de savoir que dire, quand parler et quand se taire. 

Il existe une question générale que nous devons nous poser. Elle concerne l’attitude globale du chrétien à l’approche de la mort. Doit-il souhaiter mourir ? Cette question fait vivement ressortir la tension que le chrétien peut ressentir entre le monde présent et celui à venir.

D’un côté, nous avons l’épisode bien connu de la vie de l’apôtre Paul où il est pris en tenaille entre son désir de s’en aller et d’être avec Christ et celui de rester ici-bas (Philippiens 1:23). Les Écritures ne disent pas comment Paul a résolu son dilemme. Le désir de mourir et d’être avec Christ semble être la marque de la spiritualité chrétienne, car c’est le désir chrétien ultime. Il est plus ou moins présent dans la vie de tout chrétien et à toutes les étapes de la vie. Mais faut-il l’encourager au point qu’il devienne la pensée dominante dans l’expérience personnelle du chrétien ?

Nous avons des raisons de croire que non. Même le croyant qui avance en âge a une vocation à accomplir. Les gens se laissent parfois convaincre qu’ils ne sont bons à rien parce qu’ils sont retraités ou souffrants. C’est une chose terrible. La force de Christ peut se manifester à travers la faiblesse physique. Ce n’est pas parce qu’il n’a plus d’emploi rémunéré que le chrétien a perdu ses dons, et Dieu lui donnera des occasions de les exercer. Il doit donc veiller à ce que son désir de mourir et d’être avec Christ (même si cela sonne pieux et exprime son désir le plus profond) ne soit pas une manière d’esquiver son devoir chrétien ou les opportunités qui se présentent à lui. 

Un chrétien qui avance en âge et faiblit physiquement peut trop facilement se laisser persuader d’abandonner. Il perd alors toute motivation et cesse de faire le moindre effort, ajoutant un fardeau superflu à ceux qui prennent soin de lui. Il est difficile d’écrire sur le sujet sans se montrer inutilement dogmatique ou prescriptif, car les situations individuelles sont souvent uniques. Mais nous souhaitons encourager le chrétien qui avance en âge et qui souffre physiquement à adopter une attitude qui n’alourdit pas sans nécessité le fardeau des autres.

En dépit de ces restrictions, il n’est rien de plus beau dans l’expérience chrétienne que le privilège d’entendre les paroles d’un chrétien mourant qui sait qu’il va mourir et qui affirme avec conviction être « prêt à partir » pour être avec Christ. Ce ne sont pas les paroles d’un suicidaire désespéré ou d’une personne qui a perdu toute motivation de vivre. Elles expriment plutôt la confiance tranquille, la conviction intérieure du chrétien. C’est sans doute ce que Paul voulait dire lorsqu’il parle d’avoir « achevé la course » et « gardé la foi » (2 Timothée 4:7).


Cet article est tiré du livre : Les choses dernières de Paul Helm