L’attirance homosexuelle : 3 composantes (Kevin DeYoung)

Parmi les gens qui sont d’accord pour dire que la Bible interdit les pratiques homosexuelles, on discute de plus en plus de l’attirance homosexuelle, à savoir si elle est en elle‑même un péché ou non.

Cette question exige une réflexion approfondie, surtout en matière de définition de nos termes. Qu’entendons‑nous par des mots comme orientation, attirance et désir ? Que veulent dire les autres par ces mêmes mots ? Que dit la Bible, si tant est qu’elle s’exprime, au sujet du sens qu’ils devraient avoir ? Bien qu’une grande partie du travail exégétique et théologique relatif à cette question ait été de longue haleine, le sujet en tant que tel est tout récent. Il en est venu à occuper un rang particulier à mesure que de plus en plus de chrétiens qui vivaient une attirance homosexuelle ont choisi, rendant ainsi un témoignage puissant de la grâce de Dieu, de vivre dans le célibat plutôt que de transgresser les enseignements clairs de la Bible.

Il est nécessaire de poursuivre ce travail afin d’aider les chrétiens à bien réfléchir à la question de l’attirance homosexuelle de manière à ce qu’ils se montrent fidèles à la Bible, aptes à apporter des soins pastoraux empreints d’amabilité et dotés de savoir‑faire culturel. J’avoue ne pas détenir toutes les réponses, ni même être certain de connaître toutes les questions à poser. Il se peut toutefois que ces composantes – se reflétant dans les trois catégories que je viens de mentionner – contribuent à jeter de bonnes assises à une réflexion et à une mise en application ultérieures.

3 composantes

1- La fidélité à la Bible

Chaque fois que l’attirance homosexuelle se manifeste avec l’intention de « convoiter », ce désir est un péché, comme ce serait le cas d’une personne attirée par des personnes du sexe opposé (Mt 5.28). Cette partie de l’équation a le mérite d’être claire. Cependant, peut‑il exister un terrain neutre d’approbation qui ne corresponde pas à un désir impur ? Je crois que oui. Un frère peut reconnaître que sa sœur est belle ou une fille devenue adulte peut reconnaître que son père est beau, sans pour autant se livrer à la moindre mauvaise forme d’epithymia (désir). De même, la personne qui éprouve une attirance homosexuelle peut reconnaître la beauté de quelqu’un de son propre sexe sans tomber sous le coup de la culpabilité morale. Usons néanmoins de prudence : les désirs impurs ne se révèlent pas toujours de façon évidente, nous portant à penser : « J’aimerais avoir des rapports sexuels avec cette personne. » Les désirs impurs s’affirment au moyen de regards insistants ou réitérés, de choix de divertissements répréhensibles, de liens émotionnels malsains, de rêveries et d’yeux convoiteurs (Job 31.1). Or, cela vaut pour chacun de nous, quelle que soit son orientation.

Quant aux particularités de l’attirance homosexuelle, il nous faut conclure que même les désirs homosexuels non souhaités sont désordonnés (et s’ils conduisent à « la convoitise », ils deviennent péché). Autrement dit, comme l’exprime un de mes amis qui éprouve une attirance homosexuelle, l’attirance homosexuelle – j’entends par là plus que le fait pour des hommes de simplement désirer la compagnie d’autres hommes ou des femmes de simplement désirer celle d’autres femmes – n’existait pas avant la chute, découle de cette dernière et n’existera plus lorsque les résultats de la chute seront finalement inversés. Les désirs sont bons ou mauvais non pas uniquement en raison de leur intensité ou de leur force, mais aussi de leur motivation. Le fait pour un homme de désirer avoir des rapports sexuels avec un autre homme (ou une femme d’en avoir avec une autre femme) ne s’inscrit pas dans l’ordre naturel des choses.

2- Des soins pastoraux empreints d’amabilité

Ce n’est cependant pas tout ce que nous devons dire. Si nous nous arrêtons là, nous démoraliserons (ou pire encore) nos frères et sœurs qui éprouvent une attirance homosexuelle qu’ils n’ont pas consciemment choisi de ressentir. Tout chrétien lutte contre des pensées qu’il ne pourra jamais vraiment saisir et des sentiments dont il n’a jamais voulu. Il ne s’agit pas ici d’un problème homosexuel, mais bien plutôt d’un problème humain.

J’imagine un jeune homme venant me dire avec larmes, à moi son pasteur : « Je me sens attiré par les hommes au lieu des femmes. Je me sens tellement sale. J’ai tellement honte. Je me trouve mauvais, je me sens malheureux, et je m’en veux de trahir Dieu chaque seconde de chaque jour. » Dans cette situation, je finirais par évoquer l’appel de tout disciple de Christ à une vie de pureté en pensée et en action, mais ce n’est pas par là que je commencerais, puisque cet homme se sent déjà impur. Je lui dirais que ce sentiment ne fait pas de lui un traître à l’égard de Dieu, et que son désir de marcher dans la sainteté prouve que l’Esprit œuvre en lui. Je lui communiquerais la bonne nouvelle de l’Évangile. Je lui dirais que je ne suis pas non plus celui que je devrais être. Je lui dirais que Jésus est un Souverain Sacrificateur miséricordieux, qui intercède pour nous et qui sait ce que c’est que d’être tenté et éprouvé. Je lui dirais que Dieu nous a donné des infirmités et des épines pour notre bien et sa gloire. Je lui dirais que Dieu peut utiliser nos combats pour nous bénir et en bénir d’autres par notre intermédiaire.

Si la personne venant se confier à moi était un quinquagénaire qui envisageait de quitter sa femme et ses enfants pour s’enfuir avec un autre homme, il se peut que mes conseils soient bien différents. Par contre, dans le cas de la personne qui combat sincèrement ce sentiment homosexuel, il serait bon de mettre l’accent sur le fait qu’il peut arriver que des désirs désordonnés surgissent spontanément en nous et que le fait d’être attirés par des personnes du même sexe que nous ne nous destine pas à une vie entière marquée par la culpabilité ou la haine de soi.

3- Le savoir‑faire culturel

Voilà où la conversation s’intensifie davantage, du fait que nous n’abordons pas simplement ce que dit la Bible ou ce que nous devrions dire, mais aussi ce que le monde en général croit que nous disons par les propos que nous tenons. Ici encore, il est primordial de définir nos termes, tout autant qu’il l’est de savoir discerner le sens que les autres donnent aux mêmes termes. Il est vrai (bien que l’on en fasse parfois abstraction) que des termes comme orientation et gay sont employés pour désigner beaucoup plus que l’activité sexuelle et le désir sexuel. Il se peut qu’ils évoquent la préférence d’une personne pour l’amitié de gens du même sexe qu’elle, la place tellement nécessaire qu’elle occupe au sein d’un groupe ou la joie que lui procurent sa camaraderie et ses conversations avec des gens du même sexe qu’elle. Lorsque les gens parlent d’« orientation » ou d’« être gay », il se peut qu’ils abordent un sujet beaucoup plus large que celui des rapports sexuels. Nous devons toutefois nous rappeler aussi que le monde n’entend probablement pas moins que « rapports sexuels » lorsque nous employons ces termes.

Pour cette raison, je préfère parler de « l’attirance homosexuelle » ou employer l’expression de Rosaria Butterfield (bien qu’elle ne soit pas de sens tout à fait identique) « des désirs homosexuels non voulus ». Peu importe comment nous analysons ces termes – et il nous est impossible de l’éviter (il serait probablement d’ailleurs nécessaire de créer aussi de nouveaux termes) –, nous devons à tout le moins exprimer clairement ce que nous voulons dire lorsque nous abordons des questions d’une si grande charge émotive et d’une si grande complexité lexicale. Dans les années à venir, l’Église se verra dans l’obligation de réfléchir à fond à ces questions, de s’y attarder souvent, puis de passer à l’action. L’Église aura une occasion en or de se montrer lente à parler et empressée d’écouter, de garder nos bibles et nos cœurs ouverts, ainsi que d’énoncer la vérité avec amour, tout en manifestant cette vérité et la grâce de Dieu. Prions que nous soyons à la hauteur du défi et prêts à saisir cette opportunité.


Cet article est tiré du livre : Qu’enseigne réellement la Bible au sujet de l’homosexualité ? de Kevin DeYoung