L’Univers n’était pas un accident (Jon Bloom)

Note de l’éditeur : Ceci est le troisième chapitre de la série le Symbole des apôtres, Ce que nous croyons et croirons encore

« Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre. » (Symbole des apôtres)

La grande majorité des gens, tout au long de l’histoire de l’humanité, ont cru que Dieu (ou un dieu ou de nombreux dieux ou une sorte d’être divin) a créé tout ce qui existe. Les mythologies et les cosmologies ont varié, mais les visions du monde qui prévalent dans presque toutes les cultures s’accordent à dire que, lorsque nous observons la terre ou les cieux, ce que nous voyons est une création.

Ainsi, pendant la plus grande partie de l’ère chrétienne, lorsque les chrétiens ont confessé dans le Symbole des Apôtres : « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre », les auditeurs non chrétiens n’ont pas trouvé incroyable le concept de Dieu comme créateur. Personne n’aurait pu concevoir que le cosmos puisse exister par lui-même. Une divinité doit avoir créé tout cela.

Aujourd’hui, cependant, du moins dans certaines parties du monde, c’est une autre histoire. De plus en plus de gens disent qu’ils trouvent notre confession concernant la création ridicule. Ils prétendent croire que le cosmos, et nous, ses habitants, sommes venus à l’existence sans aucune initiative divine. Et bien que ce ne soit pas encore la vision du monde personnelle déclarée de la majorité des individus, le naturalisme athée ou agnostique, avec son origine sans Dieu et ses visions de la fin des temps, est devenu la vision du monde la plus influente des cultures populaires en Europe, en Amérique du Nord et dans d’autres régions. Et cette vision représente un redoutable défi pour la croyance chrétienne en un Dieu Créateur.

Mais pour les chrétiens, un tel défi n’est pas nouveau. À toutes les époques, nous avons été appelés à témoigner et à confesser face à un monde non croyant, quelle que soit sa vision du monde dominante, que Dieu le Créateur est la réalité ultime, qu’il y a un sens profond dans tout ce qu’il a fait, et qu’il oriente le cours de l’avenir de sa création non pas vers l’extinction, mais vers une nouvelle naissance de liberté. Et cela demande du courage chrétien, car notre confession paraîtra insensée à ceux qui prétendent le contraire.

Une confession audacieuse

Croire que Dieu le Père est le Créateur du ciel et de la terre, c’est croire que Dieu est la réalité ultime. C’est croire :

  • que la vérité de base est l’autorévélation de Dieu en tant que « Je suis celui qui suis » (Exode 3.14), l’être qui existe par lui-même « de qui viennent toutes choses et pour qui nous vivons » (1 Corinthiens 8.6) ;
  • que Dieu est le « Père de notre Seigneur Jésus-Christ » (Romains 15.6) et « notre Père… le Père des miséricordes » (2 Corinthiens 1.2-3) pour tous ceux qui, par la foi, sont « en Christ » (Romains 8.1) ;
  • que ce Dieu est Dieu, « il n’y en a pas d’autre » (Ésaïe 45.22) ;
  • que non seulement il n’y a pas d’autre dieu, mais qu’il n’y a pas d’absence de Dieu, pas de néant ultime – que « au commencement [il y avait] Dieu » (Genèse 1.1). Point final.

Dans un monde pluraliste, cela peut sembler être une confession audacieuse. Et le christianisme n’a jamais existé que dans un monde pluraliste. Il faut du courage pour s’opposer à une vision culturelle dominante du monde et déclarer que la réalité ultime est, en fait, radicalement différente. Et historiquement, les chrétiens ont souvent été appelés à confesser le Dieu trinitaire comme réalité ultime et le cosmos comme sa création face à des cultures dont la vision du monde est diamétralement opposée (souvent avec une grande hostilité) à ce que nous confessons. Il faut du courage pour être un chrétien confessant.

En général, ces autres visions du monde dominantes ont été fondamentalement religieuses : animistes, panthéistes, polythéistes ou monothéistes. Le débat portait sur la question de savoir quelle supernature est réelle.

Mais pour la plupart des chrétiens en Occident aujourd’hui, la vision alternative du monde la plus dominante dans votre culture est fondamentalement non religieuse. Cela est dû en partie à la manière dont votre nation est constitutionnellement construite : pour accueillir une pluralité de visions du monde, ce qui, en général, est une bonne chose. Mais comme nous le savons tous, cela est également dû à l’influence du naturalisme métaphysique (la négation du surnaturel). Cette croyance s’est considérablement développée au cours des 150 dernières années, en grande partie à la suite des déductions tirées des découvertes dans divers domaines scientifiques, dont la plus célèbre est la théorie de l’évolution par sélection naturelle de Darwin. Le débat s’est maintenant centré sur l’existence même du surnaturel.

Une réalité importante en jeu dans le débat sur la création est de savoir si le magnifique cosmos a ou non une signification inhérente. Et les implications de cette question, en particulier, sont énormes.

L’espérance d’un cosmos créé

Lorsque les chrétiens confessent que Dieu le Père a créé les cieux et la terre, trois vérités sont indissociables de cette croyance : premièrement, la création de Dieu était à l’origine « très bonne » (Genèse 1.31) ; deuxièmement, après la chute de l’humanité (Genèse 3), Dieu a soumis la création à la vanité – avec l’espérance (Romains 8.20) ; troisièmement, Dieu l’a ainsi soumise « avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu » (Romains 8.21).

Cela signifie que ce que les chrétiens voient autour d’eux (ou devraient voir) est une création, une création qui est imprégnée d’une signification profonde. Nous voyons « le ciel [qui] raconte la gloire de Dieu » (Psaume 19.2) et une « terre … pleine de sa gloire » (Ésaïe 6.3). Même dans sa vanité et sa corruption, les chrétiens voient dans la création « les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité . . . dans ses ouvrages » (Romains 1.20). Et les gémissements de cette création corrompue, dont nous faisons tous l’expérience, augmentent (ou devraient augmenter) notre anticipation de « la liberté [promise] de la gloire des enfants de Dieu » (Romains 8.21), quand il fera les cieux et la terre complètement nouveaux, et « essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus ; il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur » (Apocalypse 21.1-4).

En d’autres termes, un cosmos créé par « le Dieu de l’espérance » permet au chrétien d’être rempli « de toute joie et de toute paix dans la foi, pour que vous débordiez d’espérance, par la puissance du Saint-Esprit ! » (Romains 15.13).

Le désespoir d’un cosmos non créé

Le naturalisme métaphysique, en revanche, n’offre pas un tel espoir. Le célèbre philosophe, mathématicien et naturaliste métaphysique du vingtième siècle Bertrand Russell, dans une prose magnifique et en termes brutaux, a clairement expliqué ce que signifie la croyance en un cosmos « vide de sens » :

Que l’homme est le produit de causes qui ignoraient la fin à laquelle elles tendaient ; que son origine, sa croissance, ses espoirs et ses craintes, ses amours et ses croyances, ne sont que le résultat de collocations accidentelles d’atomes ; qu’aucun feu, aucun héroïsme, aucune intensité de pensée et de sentiment, ne peut préserver une vie individuelle au-delà de la tombe ; que tous les travaux des âges, toute la dévotion, toute l’inspiration, tout l’éclat de midi du génie humain, sont destinés à s’éteindre dans la vaste mort du système solaire, et que tout le temple de l’accomplissement de l’homme doit inévitablement être enterré sous les débris d’un univers en ruines. . . . Ce n’est qu’à l’intérieur de l’échafaudage de ces vérités, seulement sur les fondations solides d’un désespoir inflexible, que l’habitation de l’âme peut désormais être construite en toute sécurité. (« Le culte d’un homme libre »)

De manière encore plus personnelle, vers la fin de sa vie, Russell disait de sa mort à venir :

Les ténèbres sont au-dehors, et quand je mourrai, les ténèbres seront au-dedans. Il n’y a aucune splendeur, aucune immensité nulle part ; seulement de la trivialité pendant un moment, et puis plus rien.

En lisant Russell, je me souviens du commentaire de Chesterton concernant un certain naturaliste métaphysique qu’il connaissait : « Il comprend tout, et tout ne semble pas valoir la peine d’être compris. » (Orthodoxie, 18) Et il est éminemment discutable que la science confirme de manière concluante une telle vision du monde, comme le prétendait Russell. Une foule de scientifiques crédibles et rationnels sont parvenus, après examen des preuves, à la conviction que Dieu le Père a créé les cieux et la terre.

Mais Russell insiste à juste titre sur ce point : le naturalisme métaphysique est sans espoir. « Il n’y a aucune splendeur, aucune immensité nulle part ». Il s’agit, après tout, d’une vision du monde construite sur « la fondation solide d’un désespoir inflexible ». Et c’est là que se trouve un indice de la vérité de ce qui est finalement réel, un indice que le cœur humain reconnaît et auquel il aspire : l’espoir.

Une question à laquelle nous pouvons répondre

Il peut être intimidant de confesser Dieu comme Créateur face à une vision du monde qui dispose d’un arsenal de prétendues affirmations scientifiques et d’objections à notre credo. Nous pensons que nous devons être capables d’y répondre de manière compétente. Si certains d’entre nous sont appelés et équipés pour le faire, beaucoup d’entre nous ne le sont pas.

Mais tous les chrétiens ont quelque chose dont toute autre personne a désespérément besoin et qu’elle ne peut s’empêcher de rechercher : l’espérance. C’est pourquoi Pierre a dit : « Soyez toujours prêts à défendre l’espérance qui est en vous, devant tous ceux qui vous en demandent raison. » (1 Pierre 3.15) Il ne voulait pas dire que nous devions tous être prêts à démonter et à neutraliser la vision du monde d’autrui. Il voulait dire que nous devrions tous être prêts à expliquer notre espérance.

L’espérance est nécessaire à la vie humaine. Nos âmes ont besoin de l’espérance comme nos corps ont besoin de nourriture – nous ne pouvons pas continuer sans cela. Ce qui signifie que ceux qui adhèrent à la description de la réalité ultime proposée par Russell ont dans leur tête une croyance que leur cœur ne peut pas vraiment supporter. Une foi (ce qu’est le naturalisme) construite sur un fondement de désespoir inflexible est vulnérable à une foi construite sur le fondement de l’espérance.Le christianisme ressemble à une « folie » pour les non-croyants (1 Corinthiens 1.18). C’est ainsi que Dieu l’a conçu. Il a choisi « les choses folles du monde pour couvrir de honte [ceux qui se croient] sages » (1 Corinthiens 1.27). Il ne faut donc pas s’étonner que les naturalistes métaphysiques nous traitent de fous. Mais le christianisme est abondamment riche précisément de ce dont le naturalisme métaphysique est dépourvu : l’espérance. Cela peut nous donner du courage lorsque nous confessons notre audacieuse croyance en Dieu le Père, Créateur du ciel et de la terre. Car lorsqu’on nous demande comment « par la foi, nous comprenons que l’univers a été formé par la parole de Dieu » (Hébreux 11.3), nous pouvons être prêts à leur offrir ce dont ils ont le plus besoin : le Dieu de l’espérance.


Cet article est une traduction de l’article anglais « The Universe Was No Accident » du ministère Desiring God par Timothée Davi.