L’idolâtrie cachée et manifeste (Paul Tripp)

J’ai visité plusieurs fois le nord de l’Inde. Il y a peu d’endroits au monde où règnent des ténèbres spirituelles aussi profondes. Tous les domaines de la vie culturelle et individuelle sont imprégnés d’idolâtrie. Où que vous vous trouviez, vous apercevrez un autel érigé en hommage à l’un des nombreux dieux hindous. Un jour, je suis entré dans un temple et j’ai observé un jeune moine alors qu’il nourrissait, baignait et habillait une idole. J’ai vu son collègue allongé sur le sol, prosterné devant une statue de bois et d’or. Leur sincérité et leur dévotion m’ont renversé. Ces images inanimées exercent une emprise totale sur la vie de ces jeunes prêtres, bien qu’elles soient incapables de voir, de parler ou d’agir en faveur de leurs adorateurs. J’ai également observé des hordes de pèlerins pauvres se jeter dans le Gange après un long et périlleux voyage afin de purifier leurs âmes et d’obtenir une réponse favorable à leurs prières.

Un jour, j’ai aussi regardé des individus défiler les uns après les autres pour présenter leur hommage à une pierre noire, haute de quatre mètres et demi, en forme de phallus. Je me suis dit : « Comme ces gens sont aveugles et bernés! À quel point Dieu, le Dieu vivant et véritable, doit-il trouver ces pratiques complètement dégoûtantes ! » Je suis littéralement sorti du temple en courant, bouleversé par tant de ténèbres et me consolant ainsi : «  Je suis heureux de ne pas leur ressembler!  » Pourtant, en me retournant pour jeter un dernier coup d’œil vers le temple, j’ai dû me rendre humblement à l’évidence : je suis comme eux. Je ne voue pas de culte aux images visibles de la religion polythéiste hindoue, mais mon cœur abrite plusieurs idoles cachées. D’une manière ou d’une autre, elles prennent la place de Dieu et il les considère comme aussi repoussantes que le rituel qui m’avait tant bouleversé ce jour-là. Elles commandent mon adoration quotidienne, déterminent ma vie de tous les jours et influencent ma façon de réagir aux circonstances, bien qu’elles ne possèdent absolument aucun pouvoir de délivrance. Il m’arrive parfois d’être aussi aveugle et dupe que ces jeunes moines dans le temple.

L’idolâtrie pratiquée au grand jour nous enseigne plusieurs leçons précieuses sur la manière dont l’idolâtrie cachée gouverne nos vies.

Cette manière d’envisager nos motivations ne se retrouve que dans les Écritures. La Bible est seule à affirmer que les êtres humains sont par nature des adorateurs et que l’adoration influence nos paroles et nos actions. La Parole de Dieu insiste sur le fait que nous servons nécessairement Dieu ou un quelconque aspect de la création et ainsi, ce qui gouverne le cœur exerce inévitablement une influence sur notre vie et notre conduite.

L’idolâtrie cachée dans le cœur peut souiller même les moments les plus solennels. Par exemple, la prière constitue une intervention principalement centrée sur Dieu et pourtant, un cœur idolâtre peut la corrompre. Avez-vous déjà répété silencieusement une prière avant de la prononcer à voix haute? Vous voyez ce que je veux dire ? «  Notre bon Père céleste… non, non… Notre Père, toi qui es souverain et plein de bonté… non… Père céleste, nous sommes… » Pourquoi nous donner tant de mal? Cherchons-nous à trouver les mots justes pour le Seigneur ? C’est inutile, puisqu’il assiste aussi à la répétition! N’essayons-nous pas plutôt d’utiliser la prière publique pour attirer le respect des gens autour de nous ? Nos cœurs aspirent avec une telle passion à recevoir l’approbation des autres, si bien que nous avons recours à un acte d’adoration pour obtenir la gloire personnelle !

C’est pourquoi le principe contenu dans le passage d’Ézéchiel s’avère si important. La grâce transformatrice de Dieu vise le changement des cœurs. La bataille spirituelle se livre sur le terrain du cœur. Quand cette guerre est gagnée, la conduite des croyants plaît à leur Créateur. Dieu ne se contente jamais des miettes du changement superficiel. Il s’indigne plutôt contre une telle attitude :

« Ainsi quand ce peuple s’approche de moi, il me glorifie de la bouche et des lèvres; mais son cœur est éloigné de moi  » (Ésaïe 29.13).

Cet article est un extrait de Instruments entre les mains du rédempteur par Paul Tripp.