Les doctrines inspirant les exercices pratiques- La doctrine du péché (Paul Tripp)

Quand Pascal et Marianne sont venus me consulter au sujet de leur mariage, il m’est apparu évident que leurs problèmes ne dataient pas d’hier. Leur relation n’avait jamais été exempte de conflits. Pascal était un bourreau de travail dur et perfectionniste qui considérait l’échec comme une malédiction et les loisirs comme une preuve d’irresponsabilité. Il avait l’habitude d’être terriblement exigeant envers Marianne et de la juger sévèrement si son travail n’était pas absolument parfait. Ses relations avec Marianne et leurs enfants étaient empreintes de cynisme et de méchanceté.

Marianne était une femme remplie de colère et elle ressassait sans arrêt tout le mal que Pascal lui faisait endurer. Elle se rappelait chaque incident malheureux dans le menu détail. À sa manière, elle était en guerre contre Pascal et lui rendait continuellement la pareille. Pourtant, Marianne était inconsciente de la colère qui grondait en elle. Elle se voyait plutôt juste et acceptable, la pauvre victime d’une vie intolérable. Comment parvenir à comprendre les difficultés de Marianne? Quel exercice pratique pourrait contribuer à une meilleure compréhension de la situation, tant de la part du conseiller, que de Marianne elle-même?

Les problèmes humains se situent à un niveau plus profond que celui des comportements, des sentiments et des étiquettes que la culture appose sur ces problèmes, comme le manque d’estime de soi, la dépendance affective, la compulsion, le trouble de la personnalité limite, le trouble obsessionnel compulsif, l’enfant qui refuse de grandir, ainsi de suite. Certains problèmes s’avèrent plus fondamentaux que les habitudes, les actions, les paroles et l’autosuggestion. Le conseiller biblique ne souhaite pas simplement remplacer des comportements, des sentiments et des connaissances par d’autres comportements, sentiments et connaissances. Il s’intéresse plutôt à la racine du problème.

Le conseiller biblique se distingue par l’attention qu’il accorde au « cœur » tel que le définit la Bible. En cela, il se démarque nettement d’une culture qui ne croit même pas à l’existence du cœur. En psychologie moderne, le terme est considéré comme archaïque. Dans les psychologies christianisées, le mot est chargé de connotations séculières. Ainsi, on entend parler de « cœurs blessés », des « besoins du cœur » ou l’on perçoit le cœur comme « l’endroit où sont enfermés les blessures refoulées et les souvenirs douloureux ». Aucune de ces définitions ne correspond à la vérité. Il s’avère impossible de diagnostiquer correctement la cause des problèmes humains lorsque les concepts séculiers dominent.

S’il veut voir des transformations essentielles et durables s’opérer en lui, un individu doit adopter une définition biblique du péché, incluant une analyse du cœur.

Les Écritures affirment que la racine des problèmes humains se trouve dans le cœur. Le « système racinaire » du cœur (Hébreux 4.12; Genèse 6.5) produit des fruits sous forme de paroles et d’œuvres. Les comportements découlent directement de ce qui gouverne le cœur. Chaque aspect de la vie d’une personne est influencé par ce qui domine son cœur.

Christ en a parlé en utilisant un langage simple et clair. Un tel tire du bien du bon trésor de son cœur, un autre tire du mal du mauvais trésor de son cœur. Le problème du fruit est directement lié à celui de la racine. Pourtant, peu de gens nous consultent avec l’idée d’examiner leur cœur. La plupart du temps, ils veulent s’attaquer aux problèmes extérieurs. En réglant ces derniers, ils comptent retrouver le bonheur. Dans le meilleur des cas, ils cherchent simplement à se débarrasser de sentiments intérieurs désagréables.

Ézéchiel 14.5-6 déclare que l’intention de Dieu est différente. Il veut « toucher les cœurs » de ceux qui se sont détournés de lui. Il ramène à lui le cœur de son peuple, afin qu’il soit en mesure de le servir, lui seul. Le conseiller biblique doit également viser ce même but pour les cœurs.

Une fois de plus, les exercices jouent un rôle de première importance. Les Écritures agissent comme un miroir. En les examinant avec soin, la personne en situation de counseling se voit telle qu’elle est. Hébreux 4.12 enseigne que la Parole est le moyen par excellence pour révéler les mystères du cœur. Elle a le pouvoir de pénétrer et d’exposer les sentiments et les pensées qui motivent les comportements de notre interlocuteur.

La personne en situation de counseling doit se rendre compte que son cœur réagit continuellement à ce qui se passe autour d’elle. Si son cœur est dominé par autre chose que Dieu, elle ne réagira pas aux circonstances selon ce que Dieu a commandé. Par exemple, Jacques identifie la cause des conflits humains comme étant les désirs qui combattent en nous. Du fait de ces désirs « cantonnés » dans les cœurs, les gens se font la guerre. Il est primordial que l’individu que nous aidons reconnaisse et avoue les pensées et les intentions de son cœur, puisqu’elles conditionnent ses réactions. Comment la doctrine du péché conduit-elle à certains exercices ciblés?

J’ai demandé à Marianne de rédiger pendant quelques semaines un journal de ses conversations avec Pascal. Par la suite, je lirais ce compte-rendu et le conserverais jusqu’à la rencontre suivante. Je savais que la colère ressortirait comme un thème déterminant du journal, et j’avais raison. J’ai donc souligné toutes les manifestations de colère évidentes. En plus de tenir ce journal, j’ai demandé à Marianne d’étudier les passages suivants dans la Parole : Ézéchiel 14.1-5; Luc 6.43-45 et Jacques 4. Peu à peu, Marianne a pu voir son cœur et sa colère, et la façon dont ils influençaient son attitude envers Pascal.

La rédaction d’un journal méthodique et adapté à la situation, ajoutée à des exercices bibliques touchant le cœur conduisent la personne en situation de counseling à prendre la responsabilité des changements essentiels à effectuer. Ils corrigent les fausses idées reçues de la culture au sujet de l’origine de ses problèmes et guérissent l’aveuglement spirituel causé par les tromperies
du péché.

En dénonçant le péché, nous nous assurons de toujours offrir des solutions de rechange : la justice, la paix, l’amour, l’obéissance et la résolution des problèmes. À mesure que Marianne reconnaît ce qui est mal (Éphésiens 4 parle de se dépouiller), elle voit également par l’évangile de Christ ce que Dieu veut qu’elle fasse en contrepartie (les choses dont elle doit se revêtir). Les exercices aident notamment à comprendre comment rétablir la paix en cherchant le pardon, en apprenant à confronter humblement avec douceur et en témoignant un amour tangible, même si notre prochain agit en ennemi à notre égard. Les exercices deviennent l’occasion de planifier les « œuvres bonnes que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions » (Éphésiens 2.10). Notre doctrine du péché exige des exercices incitant les personnes que nous conseillons à repenser leur manière de voir les problèmes et à suivre une direction claire vers des changements précis.

Cet article est un extrait de Instruments entre les mains du rédempteur par Paul Tripp.