Les idoles à la source de l’idolâtrie (David Powlison)

Compte tenu de la tendance persistante à évaluer les gens selon des types, on pourrait éventuellement entendre ce genre d’affirmation : « Son idole racine est… » Toutefois, les données sur l’idolâtrie n’appuient pas de manière générale ce genre de compréhension réductionniste du cœur humain[1]. Dans le meilleur des cas, le commentaire pourrait être atténué : « L’idole la plus caractéristique chez lui est… habituellement… cependant, à d’autres moments… ! » À des fins purement heuristiques, il est sans doute utile de noter qu’une personne est particulièrement encline aux idoles associées à l’intimité, une autre aux idoles de l’évitement, une autre aux idoles du pouvoir, du confort, du plaisir, de la religiosité, et ainsi de suite.

Le style de péché d’une personne, « la chair caractéristique », selon le terme explicite de Richard Lovelace[2], peut avoir tendance à se regrouper autour d’idoles prédominantes précises. Cependant, le péché est aussi inventif qu’il est tenace ! Le réductionnisme que la Bible présente constamment n’est pas une typologie qui distingue les individus les uns des autres. C’est plutôt un résumé analytique qui souligne nos traits communs : tous se sont détournés de Dieu, « chacun suivant sa propre voie », « faisant ce qui est juste à ses propres yeux »[3]. De toute évidence, selon cette catégorisation maîtresse, le temple du cœur regorge de formes possibles d’idoles et de faux dieux. Les désirs (pluriel) de la chair prolifèrent et sont envahissants. Ils s’opposent à l’Esprit et revendiquent notre foi et notre obéissance.

Ainsi, les typologies constituent de fausses explications. Elles sont descriptives et non analytiques, bien qu’en tant qu’outils conceptuels dans diverses approches psychologiques et psychothérapeutiques, elles prétendent détenir un pouvoir explicatif.

Au mieux, les typologies décrivent des « syndromes », des modèles de résultats et d’expériences de vie qui surviennent couramment ensemble[4]. Or, les typologies actuelles ne sont pas utiles pour exposer les problèmes réels dans la vie de gens réels. Elles sont tout au plus redondantes dans leur description et leur connaissance intime d’un individu particulier. Au pire, elles sont porteuses de données conceptuelles qui peuvent induire en erreur puisqu’elles évitent d’aborder la question de l’idolâtrie.

Jay Adams a commenté de manière perspicace l’aspect collectif inhérent à tous les styles individuels du péché :

Ainsi, le péché dans toutes ses dimensions est de toute évidence le problème contre lequel le conseiller chrétien doit se battre. Ce sont les dimensions secondaires, les diverses variantes des thèmes courants, qui rendent le counseling si difficile. Tandis que tous les hommes sont nés pécheurs et qu’ils s’engagent tous dans les mêmes pratiques et fraudes pécheresses, chacun développe sa propre manière de pécher. Les styles (ou combinaisons de péchés et de machinations) sont propres à chaque individu. Cependant, ils comportent tous des thèmes communs sous-jacents. C’est le travail du conseiller de découvrir les points communs dissimulés sous ces individualités[5].

Cet article est tiré du livre : Les idoles du cœur et la foire aux vanités de David Powlison


[1] Bien sûr, à des moments précis dans le temps, il sera nécessaire de nommer et d’affronter des idoles précises. Le counseling biblique sage aborde des sujets précis. Jésus a interpelé le jeune homme riche concernant son adoration de Mammon. La parabole du semeur place les gens devant leur incrédulité, leur conformisme social, leur recherche du plaisir, leurs princi- paux soucis : tous peuvent être reformulés par des expressions qui décrivent le modèle idolâtre. Dans l’Ancien Testament, Élie s’oppose directement au culte de Baal. Ainsi, Wally devra faire face à l’impulsion qui le pousse à performer aux yeux des autres à mesure que la question sera élaborée au cours du counseling.

[2] Richard Lovelace, Dynamics of the Spiritual Life, trad. libre, Downers Grove, Ill., InterVarsity Press, 1979.

[3] Ésaïe 53.6 et Juges 21.25.

[4] Le mot « syndrome » devrait être dépouillé de ses prétentions cli- niques à un pouvoir explicatif d’importance. Il est purement descriptif. Il signifie littéralement : « choses qui tendent à aller ensemble ».

[5] Jay Adams, Christian Counselor’s Manual, trad. libre, États-Unis, Presbyterian and Reformed Publishing Co., 1973.