Le Saint-Esprit, celui qui donne la vie

Lors de la campagne présidentielle de 1976 aux États-Unis, Jimmy Carter a déclaré être « né de nouveau ». À peu près à la même époque, l’ancien conseiller du Président Nixon, Charles Colson, a publié un livre relatant sa conversion au Christ, simplement intitulé Born Again (Né de nouveau). Ce terme connu principalement des chrétiens évangéliques a soudainement été propulsé sur le devant de la scène nationale.

Depuis lors, l’expression « né de nouveau » a été adoptée pour toutes sortes d’usages qui n’ont rien à voir avec le type de conversion spirituelle que Carter et Colson avaient à l’esprit. Par exemple, un athlète qui connaît un retour en force dans sa carrière peut dire qu’il est « né de nouveau » quant à ses compétences. D’une certaine manière, la véritable signification de cette locution importante a été obscurcie par son utilisation fréquente et abusive.

L’idée de naître de nouveau, de faire l’expérience d’une renaissance spirituelle, vient directement de l’enseignement de Jésus que nous trouvons dans le troisième chapitre de l’Évangile selon Jean, où ce dernier rapporte une rencontre entre Jésus et un dirigeant juif du nom de Nicodème.

Jean a écrit : « Mais il y eut un homme d’entre les pharisiens, nommé Nicodème, un chef des Juifs, qui vint, lui, auprès de Jésus, de nuit, et lui dit : “Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Dieu ; car personne ne peut faire ces miracles que tu fais, si Dieu n’est avec lui” » (Jn 3.1,2). Nicodème est venu voir Jésus de nuit, probablement parce qu’il ne voulait pas être vu en sa compagnie. Cependant, son discours était flatteur, puisqu’il présentait Jésus comme étant « un docteur venu de Dieu ». Mais Jésus l’a interrompu et lui a dit : « En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu » (v. 3). Jésus affirmait ainsi que la nouvelle naissance est une étape nécessaire à l’entrée dans le royaume de Dieu. C’est la condition sine qua non. Si vous n’êtes pas régénéré, vous ne pouvez pas y entrer.

Nicodème ne l’a pas bien compris ; il a interprété les paroles de Jésus de manière un peu niaise et d’un point de vue physique. C’est pour cette raison qu’il lui a ensuite demandé : « Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître ? » (v. 4.) Jésus lui a répondu une seconde fois : « En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu » (v. 5). L’idée de naître de nouveau ou de faire l’expérience de la nouvelle naissance n’a donc pas été inventée par Jimmy Carter, Chuck Colson ou les chrétiens évangéliques en général. Elle se trouve dans l’enseignement de Christ lui-même. Ce précepte est extrêmement important, car en cela Jésus mentionne une condition nécessaire à l’entrée dans le royaume de Dieu.

J’ai un peu de mal à entendre des gens dire : « Je suis un chrétien né de nouveau. » Quel est le problème d’une telle affirmation ? Eh bien, existe-t-il un autre type de chrétien ? Si la nouvelle naissance est absolument essentielle pour entrer dans le royaume de Dieu, comme Jésus l’a dit, il ne peut pas y avoir de chrétien qui ne soit pas né de nouveau. Dire « chrétien né de nouveau » revient à dire « chrétien chrétien ». C’est une redondance, une sorte de bégaiement théologique.

Par ailleurs, est-il possible d’être un « non-chrétien né de nouveau » ? Il m’est arrivé d’entendre des gens dire : « Je suis un musulman né de nouveau » ou « Je suis un bouddhiste né de nouveau ». Je voudrais leur dire que s’ils sont nés de nouveau au sens néotestamentaire, ils ne sont plus musulmans ou bouddhistes. Les seules personnes qui soient nées de nouveau sont les chrétiens.

De la mort spirituelle à la vie

Il est essentiel de bien comprendre l’action du Saint‑Esprit dans la nouvelle naissance spirituelle. L’un des meilleurs passages pour acquérir cette compréhension se trouve dans le deuxième chapitre de la lettre de l’apôtre Paul aux Éphésiens. Nous y lisons ce qui suit :

Vous étiez morts par vos offenses et par vos péchés, dans lesquels vous marchiez autrefois, selon le train de ce monde, selon le prince de la puissance de l’air, de l’esprit qui agit maintenant dans les fils de la rébellion. Nous tous aussi, nous étions de leur nombre, et nous vivions autrefois selon les convoitises de notre chair, accomplissant les volontés de la chair et de nos pensées, et nous étions par nature des enfants de colère, comme les autres… Mais Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, nous qui étions morts par nos offenses, nous a rendus vivants avec Christ (c’est par la grâce que vous êtes sauvés) ; il nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes, en Jésus‑Christ (v. 1-6).

Le langage et les images utilisés par l’apôtre dans ce texte ont trait à la vie et à la mort. Il affirme que les chrétiens ont été « rendus vivants ». Mais s’ils sont maintenant vivants, qu’étaient-ils auparavant ? Ils étaient « morts par [leurs] offenses et par [leurs] péchés ». Paul parle donc d’une sorte de résurrection, d’une transformation de personnes qui étaient mortes vers une vie nouvelle.

Nous devons comprendre de quel type de mort il s’agit ici. Paul ne parle pas d’une résurrection physique puisqu’il ne parle pas de mort physique. Ceux qui ont été rendus vivants par le Saint‑Esprit étaient des êtres vivants, des organismes biologiques qui respiraient avant cette expérience de la nouvelle naissance. Avant de devenir chrétien, mon cœur battait, mes poumons se remplissaient d’air et se vidaient, et mon cerveau était actif (même si mes professeurs se posaient parfois des questions). Mais j’étais spirituellement mort. J’étais mort aux choses de Dieu parce que j’existais uniquement et entièrement dans ce que Jésus et les apôtres appellent « la chair ».

Dans sa conversation avec Nicodème, après lui avoir expliqué que nul ne peut entrer dans le royaume de Dieu s’il ne naît d’eau et d’Esprit, Jésus a poursuivi en affirmant : « Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit. Ne t’étonne pas que je t’aie dit : “Il faut que vous naissiez de nouveau”. Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit ; mais tu ne sais pas d’où il vient, ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit » (Jn 3.6‑8).

Jésus fait ici la distinction entre la puissance du Saint‑Esprit et celle de la chair humaine. Il déclare : « Ce qui est né de la chair est chair. » Il parlait des gens et il disait que non seulement les êtres humains viennent au monde avec un corps physique, mais aussi qu’ils naissent déchus. Cela signifie qu’ils n’ont pas de vie spirituelle. Au contraire, ils naissent en étant spirituellement morts.

Il n’y a peut-être rien dans les Écritures qui rebute davantage l’homme moderne que cette affirmation selon laquelle tout être humain naît dans un état de mort spirituelle. Cette idée répugne même la communauté chrétienne dans son sens large. La plupart des gens qui se disent chrétiens reconnaissent qu’il y a des défauts dans la race humaine, que nous sommes tous pécheurs et qu’aucun d’entre nous n’est parfait. Mais moins d’un pour cent des chrétiens croient vraiment que chaque être humain est déjà spirituellement mort lorsqu’il vient au monde. Même Billy Graham avait l’habitude de dire que l’homme naturel est mortellement malade, au point qu’il est à quatre-vingt-dix-neuf pour cent mort, mais l’orateur n’allait jamais jusqu’à dire « cent pour cent ». Le rejet de cette idée est si répandu que certains des principaux porte-parole du christianisme sont prêts à la contredire. Ils n’acceptent pas l’idée d’une mort spirituelle totale.

Pourtant, c’est clairement ce qu’a affirmé Paul. Nous sommes morts à l’arrivée dans ce monde sur le plan spirituel – pas seulement faibles, souffrants, gravement malades ou comateux. Nous n’avons ni pouls spirituel, ni respiration, ni activité cérébrale spirituelle. Nous sommes spirituellement mort-nés, et nous le restons, à moins que le Saint‑Esprit nous donne vie.

Suivre une voie et un prince

Paul a déclaré aux Éphésiens : « Vous étiez morts par vos offenses et par vos péchés, dans lesquels vous marchiez autrefois, selon le train de ce monde, selon le prince de la puissance de l’air » (Ép 2.1). Il s’adressait à des chrétiens, mais ceux-ci ont tous été, à un moment donné de leur vie, des non-chrétiens, et chacun d’eux manifeste un certain type de comportement. Paul affirme ici que ceux qui sont spirituellement morts suivent une voie et un prince.

Dans l’épître aux Romains, au chapitre 3, Paul a écrit : « Il n’y a point de juste, pas même un seul ; nul n’est intelligent, nul ne cherche Dieu. Tous sont égarés, tous sont pervertis ; il n’en est aucun qui fasse le bien, pas même un seul » (v. 10b‑12). Il déclare ici que tous sont « égarés », qu’ils ont quitté le chemin. Si, par nature, nous ne cherchons pas Dieu, est-il surprenant que nous nous écartions du chemin qui mène à lui ? Je trouve fascinant le fait que dans le Nouveau Testament, les disciples de Christ ne s’appelaient pas « chrétiens ». C’est à Antioche qu’ils ont été ainsi appelés pour la première fois (Ac 11.26), mais ce terme semble avoir été créé par des non-chrétiens pour se moquer d’eux. Au départ, les chrétiens se décrivaient comme des gens qui suivent « la voie » (voir Ac 19.9,23), parce qu’ils avaient entendu Christ parler de deux chemins, l’un spacieux et l’autre étroit (Mt 7.13,14). La grande majorité des gens empruntent la mauvaise voie. En réalité, nous commençons tous sur ce chemin spacieux, car la route large est celle du monde. Paul dit encore : « Nous tous aussi, nous étions de leur nombre » (voir Ép 2.3). Être mort spirituellement, c’est être du monde. C’est adhérer et suivre de manière servile les valeurs et les coutumes de la culture séculière.

Non seulement ceux qui sont morts spirituellement empruntent le chemin de ce monde, mais ils suivent aussi « le prince de la puissance de l’air » (v. 2). Y a-t-il un doute quelconque sur l’identité de celui duquel Paul parle ici ? C’est le titre qu’il donne à Satan, « l’esprit qui agit maintenant dans les fils de la rébellion » (v. 2). Tous ceux qui sont spirituellement morts suivent les désirs de Satan en rejetant Dieu et ses exigences qui sont pourtant justes.

Tel est donc notre état naturel. Il s’agit là d’une image de ce que l’on appelle, en théologie, le péché originel, cet état de corruption mortelle, de mort spirituelle, dans lequel nous naissons tous.

Une œuvre de recréation

C’est le ministère et l’œuvre du Saint‑Esprit que d’aller vers des personnes spirituellement mortes, qui marchent selon le courant de ce monde en suivant le prince de la puissance de l’air, qui accomplissent les désirs de leur chair et de leurs pensées, afin de les recréer en les régénérant. « Régénérer » signifie « générer de nouveau ». Par la régénération, l’Esprit donne la vie à des personnes qui n’ont pas de vie spirituelle.

La régénération est une œuvre que le Saint‑Esprit accomplit immédiatement dans l’âme des humains. Quand je dis « immédiatement », je ne veux pas dire « rapidement », mais « sans aucun intermédiaire ». Il ne donne pas à l’individu une dose d’un médicament, mais, dans cette mort spirituelle, il apporte directement la vie. Cette action immédiate est exprimée dans les paroles que l’ange Gabriel a adressées à Marie : « Le Saint‑Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très‑Haut te couvrira de son ombre » (Lu 1.35a). Dans cette situation, la vie de Jésus a été générée immédiatement et directement, et non via les processus habituels de reproduction.

Dans ce sens, nous voyons dans la rédemption une sorte de récapitulation de la puissance que le Saint‑Esprit a manifestée dans la Création. Le même Dieu qui a créé le monde le rachète également. L’œuvre de la Création était trinitaire, de même que l’œuvre de la rédemption. Nous le voyons clairement dans Genèse 1, où nous lisons : « Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre. La terre était informe et vide ; il y avait des ténèbres à la surface de l’abîme » (v. 1,2a). Ce sont les premières phrases des Saintes Écritures. Immédiatement après ces versets, nous lisons une brève description de l’activité de Dieu au milieu de ces ténèbres, de ce vide et de cette absence de forme : « L’Esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux » (v. 2b). Dans le Nouveau Testament, le Saint‑Esprit apparaît sous la forme d’une colombe ; ici, il est peut-être représenté comme une mère oiseau planant au-dessus de ses oisillons pour les protéger. Jésus a évoqué ce concept lorsqu’il s’est lamenté devant la ville de Jérusalem et qu’il s’est écrié : « Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et qui lapide ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble sa couvée sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! » (Lu 13.34.) L’Esprit se tenait au-dessus de la création pour la guider et la protéger, et il en est de même dans l’œuvre de la régénération.

Les Écritures montrent clairement que faire surgir la vie là où tout est mort et créer quelque chose à partir du néant est l’une des choses que Dieu seul peut accomplir. L’étape suivante dans la Création a été celle de la lumière : « Dieu dit : “Que la lumière soit”, et la lumière fut » (Ge 1.3). Dieu n’a pas eu besoin d’appuyer sur un interrupteur ou de frotter deux bâtons l’un contre l’autre pour créer une étincelle afin de produire la lumière. C’est son ordre souverain qui a fait naître la lumière. De la même manière, sa puissance divine introduit la vie là où il n’y en a pas.

Jésus s’est approché du tombeau de Lazare, mort depuis quatre jours, et a crié d’une voix forte : « Lazare, sors » (Jn 11.43b). Lorsque Jésus a prononcé ces mots, le cœur de Lazare s’est instantanément mis à battre et à pomper du sang. L’activité cérébrale a repris. La vie est revenue dans son corps et il est ressorti de sa tombe. C’est exactement ce qui se produit en nous lors de notre renaissance. Le même Esprit qui a fait surgir la vie de l’abîme et Lazare du tombeau nous arrache à la mort spirituelle en nous faisant naître une seconde fois.


Cet article est extrait du livre : «Qui est le Saint-Esprit ?» de R.C. Sproul