La vocation et le domaine séculier (Paul Helm)

Il y a quelques années, on parlait beaucoup de «christianisme séculier» et même de «christianisme sans religion». Les adeptes de ce concept défendaient l’idée selon laquelle l’humanité est désormais parvenue à «maturité» et n’a plus besoin de la béquille de la religion. On considérait cette idée comme un élément essentiel du message chrétien. Il semble que ces revendications soient désormais largement tombées dans l’oubli.

Si la notion de «christianisme séculier» au sens littéral est contradictoire en soi, les Écritures affirment qu’il existe bel et bien une relation entre la foi chrétienne et «le séculier». Le critère pour déterminer si tel appel est honorable ou non ne réside pas tant dans la nature du travail que dans les réponses aux questions suivantes : est-il conforme à la loi ? Conduit-il le chrétien à pécher ? Sinon, exerce-t-il sa profession par ambition personnelle ou pour la gloire de Dieu et le bien d’autrui en réponse à l’amour et à la miséricorde de Dieu manifestés en Christ ? Dans le second cas, le chrétien utilise-t-il au mieux ses talents dans les circonstances où il se trouve, travaillant avec efficacité et dans un esprit de coopération, mobilisant ses compétences, rachetant le temps, etc. ? Ces trois conditions définissent la valeur du travail du chrétien.

Dans la mesure où tout travail possède une valeur intrinsèque et où de nombreux appels sont licites, il n’est plus possible d’assimiler la volonté de Dieu à une seule profession ou à une tâche particulière (ce serait une sorte d’idolâtrie). C’est une conséquence importante. En effet, tous les intérêts légitimes des hommes sont conformes à la volonté de Dieu.

“L’analyse biblique du travail et de l’appel quotidien ne repose donc pas sur un dualisme entre le corps et l’âme ou entre le sacré et le séculier, mais sur la distinction entre un amour de soi excessif (opposé à l’amour pour Dieu) et un amour de Dieu qui est aussi un amour du prochain et de soi-même.”

“Les «deux cités», selon Augustin d’Hippone (la cité de Dieu et celle de ce monde), vont toujours de pair dans cette vie. Le chrétien est un citoyen de la cité de Dieu, mais cela ne signifie pas qu’il n’est pas investi dans des cités terrestres. Il n’y a pas non plus de séparation artificielle entre la citoyenneté du royaume de Christ” “et celle du royaume des hommes (telle qu’elle apparaît plus tard dans le luthéranisme), comme si elles ne se croisaient jamais. Le chrétien doit plutôt accepter des responsabilités ordinaires et les mener à bien dans un objectif ultime, la gloire de Dieu.”


Cet article est tiré du livre : La vie chrétienne est une vocation de Paul Helm