Discerner la structure du texte et son idée maîtresse (David Helm)

Outre le fait de laisser le contexte biblique déterminer le sens du texte et d’en découvrir la ligne mélodique, les enseignants bibliques font une chose supplémentaire pendant la phase exégétique de leur préparation. Ils tentent de comprendre quelle est la structure squelettique du texte à partir duquel ils prêchent. Ils se demandent : Comment l’auteur a-t-il organisé ce texte ? Que révèle l’organisation de cet écrit quant à ce que l’auteur veut mettre en évidence ?

Dans son livre How to Read a Book, Mortimer Adler observe :

Chaque livre est constitué d’un squelette. Votre tâche en tant que lecteur analytique consiste à le trouver. Un livre se présente à vous avec de la chair qui recouvre ses os et des vêtements habillant sa chair. Il est tout vêtu […] vous devez le lire avec une vision à rayon X, car il est essentiel de saisir la structure d’un livre pour le comprendre1.

Si M. Adler a raison, vous ne pouvez pas découvrir le thème principal d’un texte à moins d’en avoir saisi la structure squelettique au préalable. Autrement dit, pour faire un bon exposé biblique, vous devez avoir vu les os et la moelle du texte biblique.

Quand il s’agit de prédication, on peut dire que :

  • Chaque texte a une structure.
  • La structure révèle ce que le texte considère comme important.
  • Je devrais soumettre mon sermon à la forme du texte et à ce qu’il met en relief.

Cet aspect de l’exégèse nous ramène à la définition de la prédication textuelle que j’ai donnée dans l’introduction. C’est une prédication investie de puissance, qui se soumet comme il se doit au texte. C’est la forme et le thème du texte biblique qui dictent la forme et le thème de la prédication.

Pour la plupart d’entre nous, c’est là où le bât blesse. Nous prêchons sans appréhender la structure squelettique du texte. En conséquence, nous en comprenons mal le sens et, à la fin de notre prédication, notre assemblée n’est pas plus avancée. Alors, comment trouver la structure d’un texte ?

Utiliser des stratégies de lecture qui fonctionnent bien, n’importe où

En essayant de trouver la structure d’un texte biblique, commencez par utiliser des stratégies simples qui sont applicables à toute la Bible.

Tout d’abord, si vous y avez accès, travaillez à partir d’une traduction qui privilégie le sens du mot à mot. Si plusieurs traductions sont disponibles dans votre langue, choisissez la plus littérale. Une traduction littérale (plutôt qu’une traduction dynamique) restitue généralement dans votre langue chaque mot de la langue originale de manière plus cohérente, ce qui devrait rendre le squelette plus visible. Cependant, aucune traduction n’accomplit cela de manière parfaite. Vous trouverez certainement cela utile de consulter plusieurs traductions. Comprenez-moi bien. On parle de préparation en privée axée sur la recherche de la structure. Quand il s’agit de prêcher, il existe toutes sortes de bonnes raisons d’utiliser une traduction moins littérale.

Ensuite, si vous avez eu l’occasion d’étudier les langues d’origine, utilisez-les. Il m’a été utile de faire ma propre traduction du texte. Le processus me ralentit, certes, mais je commence alors à comprendre l’intention de l’auteur et comment chaque partie se rapporte à l’ensemble.

Puis lisez, relisez et parcourez le texte une fois de plus, lentement et à voix haute. Plus vous passerez de temps dans le texte, plus vous en comprendrez l’organisation.

Enfin, alors que vous lisez, cherchez des répétitions d’idées, de phrases et de mots. Si votre objectif consiste à trouver la structure et l’idée maîtresse du texte, vous y réussirez généralement en étudiant certaines expressions qui reviennent souvent.

Sachez de quel genre littéraire il s’agit

Alors que certaines stratégies fonctionnent bien dans l’ensemble de la Bible, tous les types d’écrits ne s’appréhendent pas de la même manière. On ne lit pas un journal avec les mêmes outils qu’on utilise pour lire un poème. On ne lit pas un roman comme on lit une recette de cuisine. Ainsi, on ne devrait pas lire tous les livres de la Bible de la même façon.

La Bible contient différents genres littéraires : les récits de l’Ancien Testament, les livres prophétiques, les textes apocalyptiques, les livres de la sagesse et les livres poétiques, les épîtres, les Évangiles et les Actes des apôtres. On distingue parmi ces différents genres trois types de textes : le discours, le récit et la poésie. En règle générale, on ne va pas découvrir la structure d’un psaume (poésie) en utilisant les mêmes stratégies de lecture que pour un  Évangile (probablement un récit ou un discours). Connaître le fonctionnement de chacun des différents types de textes nous aide à savoir quels sont les meilleurs outils pour les comprendre.

De manière générale, le discours est l’expression verbale de la pensée. Il est logique et linéaire. On le retrouve surtout dans les épîtres, mais aussi dans les livres historiques de l’Ancien Testament, les discours prophétiques et apocalyptiques, les sermons des Évangiles et des Actes. Pour trouver la structure d’un discours, il est utile d’écrire le texte sur une feuille à part en omettant les sauts de paragraphe et les numéros de verset donnés par les éditeurs de nos Bibles. J’appelle cela « extraire » le texte de la Bible. Les choses importantes à examiner se rapportent à la grammaire. Recherchez les répétitions de mots ou d’expressions, les mots clés, les mots charnières, le flux des idées, les relations grammaticales, les propositions dépendantes et indépendantes, si le texte est écrit à la première personne (je/nous), à la deuxième (tu/vous) ou à la troisième (il(s)/elle(s)), s’il contient des formes interrogatives, déclaratives ou impératives, et des caractéristiques grammaticales analogues. En effectuant une telle analyse, vous devriez trouver la structure de votre passage et ce sur quoi il insiste2.

Un récit est une histoire, et les histoires ont tendance à suivre une structure assez particulière. Ainsi, si on étudie une épitre, il faut se concentrer sur les questions grammaticales. Par contre, si le prédicateur veut découvrir la structure et l’idée maîtresse d’un récit, il se concentrera plutôt sur les scènes, l’intrigue et les personnages. Définir les différentes scènes (là où l’activité dans le texte change de lieu géographique, par exemple) sera probablement le meilleur point de départ. Si vous prenez des passages narratifs plus longs pour votre texte de sermon, les changements de scène révéleront un principe d’organisation. Dans ces scènes (et parfois entre elles), vous rechercherez des intrigues. Ces dernières présentent généralement cinq parties :

  • La situation : La situation inclut généralement le lieu, le temps, la saison et une introduction des personnages.
  • Le conflit : Le conflit est la partie de l’histoire qui génère la tension dramatique et le sentiment que quelque chose doit être résolu. Il peut être très flagrant (comme une menace violente) ou assez subtil (comme une agitation intérieure).
  • Le point culminant : Le point culminant est le renversement ou le tournant, où la tension dramatique éclate.
  • La résolution : La résolution est le développement du point culminant, la solution au conflit.
  • La nouvelle situation : La nouvelle situation est le retour à une nouvelle sorte de norme d’où émergera la prochaine intrigue.

En tentant de définir ces parties de l’intrigue, les questions importantes sont : Quel est le conflit ? Qu’est.ce qui est à l’origine de la tension dramatique ? Quel est le point culminant ? Comment la tension est-elle résolue ? Je suis d’avis que l’idée maîtresse se trouve dans une combinaison du point culminant et de certaines parties du conflit et de la résolution.

Bien sûr, comprendre comment l’auteur met en scène les personnages (les gens dans l’histoire) est également important. Notez quels personnages l’auteur introduit et à quel moment. Remarquez comment les personnages évoluent. Soyez attentif à la façon dont l’auteur passe de l’un à l’autre. Si vous avez un bon sens de l’intrigue et des personnages, vous aurez une bonne idée de la forme et de l’idée maîtresse du récit.

La poésie est un troisième type de texte. La poésie dans la Bible se trouve principalement dans les livres de sagesse et les livres prophétiques de l’Ancien Testament. Pour en trouver la structure, vous devez examiner les répétitions de mots ou même de strophes (p. ex., les Psaumes 42 et 43 sont organisés autour de la strophe qui commence par : « Pourquoi t’abats-tu, mon âme ? »). Il vous faut également étudier les changements dans les images et les stratégies grammaticales (par exemple, les changements de personnage ou de points de vue). Toutefois, en poésie, la stratégie la plus utile pour trouver la structure et le thème est sans doute de voir comment fonctionne le parallélisme dans votre texte, en particulier la transition entre les types de parallélisme qui y existent. Le parallélisme est le terme technique utilisé pour décrire une caractéristique de la poésie hébraïque selon laquelle des vers étant liés entre eux de façon précise apparaissent souvent sous forme de paires (ou parfois de tercets). Il se peut que le deuxième vers reprenne l’idée générale du premier et qu’il l’amplifie légèrement. Le deuxième vers peut contredire le premier, le réfuter ou servir à le mettre en perspective. Mais le deuxième vers peut aussi compléter la pensée du premier. Ces différentes relations entre le premier et le deuxième vers indiquent différentes sortes de parallélisme. Voir les changements dans le parallélisme vous aidera à trouver la forme et le thème de votre texte.


1. Mortimer Adler et Charles Van Doren, How to Read a Book : The Classic Guide to Intelligent Reading [Comment lire un livre : le guide classique de la lecture intelligente], New York, Touchstone, 1940, p. 75.

2. Voir Eugene Moutoux, Drawing Sentences : A Guide to Diagramming [L’Analyse de phrases : un guide pour la création de diagrammes], Louisville, Butler Books, 2010.


Cet article est tiré du livre : La prédication textuelle de David Helm