2 exemples bibliques de miséricorde (R.C. Sproul)

« Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. » – Matthieu 5.7

Il est intéressant de voir comment les vertus des béatitudes sont mises en équilibre avec la promesse qui les accompagne. Il semble y avoir une relation entre la vertu et la récompense qui sera donnée à ceux qui font preuve de cette vertu. Ceux qui ont faim et soif de justice se voient promettre qu’ils seront rassasiés. Ceux qui sont dans l’affliction se voient promettre le réconfort. Ceux qui sont doux – c’est-à-dire ceux qui sont prêts à accepter la providence qu’ils ont dans ce monde – hériteront la terre.

Au verset 7, nous retrouvons le même genre de proportionnalité entre la vertu et la promesse : « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. » C’est à la fois effrayant et réconfortant. Ce n’est pas un enseignement inhabituel de la part de Jésus ; il a souvent enseigné ce genre de chose. Même dans la prière du Seigneur, on nous apprend à dire : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés » (Mt 6.12), et plus tard dans le sermon sur la montagne, il nous est dit que la mesure avec laquelle nous nous montrerons miséricordieux envers les autres sera la mesure de miséricorde que nous pouvons nous attendre à recevoir de Dieu (voir Mt 7.2). Cette affirmation est assez effrayante, car nous avons tendance à ne pas être aussi miséricordieux envers les autres que Dieu l’est envers nous.

La parabole du serviteur

Jésus illustre le lien entre le fait de montrer et de recevoir la miséricorde avec la parabole du serviteur impitoyable (Mt 18.23-35). Un homme avait envers son maître une dette supérieure à ce qu’il était en mesure de payer, alors il l’a supplié d’avoir pitié de lui. Son maître, faisant preuve de miséricorde, lui a remis sa dette. Mais à peine reparti, le serviteur a exigé d’un autre homme qu’il lui rembourse la petite somme qu’il lui devait. Dans cette parabole, Jésus montre l’incongruité dans le fait de recevoir une grande quantité de miséricorde divine tout en se montrant avare dans la distribution de la grâce et de la miséricorde envers d’autres humains. La promesse de miséricorde est souvent liée au commandement d’être miséricordieux – et nous, qui avons reçu la plus grande miséricorde de Dieu, sommes ceux qui devraient se montrer les plus miséricordieux envers les autres.

La femme adultère

Dans l’Évangile selon Jean, nous trouvons l’histoire de la femme prise en flagrant délit d’adultère (Jn 7.53 – 8.11). Les pharisiens ont traîné cette femme toute honteuse et embarrassée jusque dans le temple. Leur préoccupation dans cette rencontre n’avait rien à voir avec leur zèle pour maintenir la pureté de la loi de Moïse ; ils voulaient seulement piéger Jésus, et cette femme n’était qu’un pion. Selon la loi de l’Ancien Testament, l’adultère était un délit majeur punissable par lapidation et celle-ci devait être administrée par les autorités religieuses. Cependant, l’Israël de l’époque de Jésus était une nation conquise, occupée par Rome. L’une des choses que les Romains imposaient aux nations conquises était la jurisprudence romaine en matière de crimes capitaux : seules les autorités romaines pouvaient prononcer la peine de mort et procéder à une exécution.

Voilà leur piège : si Jésus disait que la femme devait être tuée pour faire respecter la loi de Moïse, les pharisiens iraient voir les autorités romaines pour leur dire que Jésus désobéissait à la loi romaine concernant la peine capitale. S’il disait de ne pas l’exécuter, il mettrait de côté les commandements de la loi juive, et les pharisiens le dénonceraient comme étant hérétique.

Au départ, Jésus n’a pas ouvert la bouche. Au lieu de cela, il a commencé à écrire dans la poussière. Jean ne nous dit pas ce qu’il a écrit. Ce n’est qu’après qu’il a dit : « Que celui d’entre vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle » (Jn 8.7). Ensuite, il s’est à nouveau baissé pour continuer à écrire sur le sol. L’une après l’autre, en commençant par les plus âgées, toutes les personnes présentes dans la foule se sont dispersées.

Ce que Jésus a fait ensuite est significatif. La femme avait péché, et la loi juive exigeait la peine capitale, mais la loi romaine disait que les Juifs ne pouvaient pas la tuer. Le Fils de l’homme avait plus d’autorité que Moïse et que l’empereur romain ; s’il voulait que cette femme soit tuée, il avait l’autorité de Dieu pour le faire. Il n’a pas ignoré la loi de Moïse. Il a reconnu que le délit de cette femme était un crime capital. Alors il a désigné son bourreau : « celui de vous qui est sans péché ». Est-ce que quelqu’un dans la foule présente était sans péché ? Il y en avait un, en effet : Christ lui-même. Il avait l’autorité et le pouvoir de faire mourir cette femme, et il ne l’a pas fait.

En fin de compte, Jésus s’est retrouvé seul avec la femme. Alors, il lui a dit : « Femme, où sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a-t-il condamnée ? » (Jn 8.10b.) Elle lui a répondu : « Non, Seigneur. » Alors il a ajouté : « Je ne te condamne pas non plus ; va, et ne pêche plus. » Il ne l’a pas déclarée innocente ni ne lui a dit de ne pas se sentir coupable. Elle avait réellement péché, et Jésus n’a pas traité ce péché à la légère. Cependant, il s’est adressé à elle avec dignité et l’a traitée avec douceur, gentillesse et sensibilité. Elle était brisée et humiliée devant Christ. Il n’a pas fait ce que la justice demandait ; il lui a fait miséricorde.

Notre seul espoir

Nombreuses sont les occasions où nous tendons la main rapidement et brusquement, sans réfléchir, vers le tas de pierres pour lapider, oubliant que nous ne sommes pas sans péché. Jésus était sans péché, mais au lieu d’administrer la justice à cette femme, il lui a fait miséricorde. Cette histoire est un microcosme de ce que nous sommes tous dans la présence de Dieu, car nous avons tous commis un adultère aux yeux de Dieu. En adorant d’autres dieux, nous avons trahi notre Bien-Aimé. L’Église est l’épouse de Christ, et l’Église est adultère.

Notre seul espoir de rester en sa présence réside dans le fait qu’il nous traite de la même façon qu’il a traité cette femme. Il a été miséricordieux, et c’est grâce à sa miséricorde que nous pouvons vivre. C’est par la grâce de Dieu que nous continuons à respirer dans ce monde. C’est pourquoi Jésus a dit : « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. » Il devrait être facile pour nous de nous montrer miséricordieux, car nous vivons chaque instant de notre vie grâce à la miséricorde de Dieu.

Cet article est tiré du livre : Comment puis-je être béni ? de R. C. Sproul