L’Évangile : le message de Dieu pour l’homme à recevoir (Paul Washer)

[Que] vous avez reçu, dans lequel vous avez persévéré […] –1 Corinthiens 15.1

Puisque l’Évangile est le message de Dieu pour l’homme, il ne serait pas trop audacieux de s’attendre à ce qu’il suscite une réaction et exige une réponse. Les Écritures nous révèlent que l’Église de Corinthe, ayant écouté l’Évangile, l’a considéré avec l’importance qui lui est due et en a fait le socle de sa relation à Dieu. Nous devons en faire de même si nous cherchons à nous réconcilier avec notre Créateur.

Recevoir l’Évangile

Pour être sauvés, les hommes doivent, par la grâce de Dieu, recevoir l’Évangile. Mais qu’est-ce que cela signifie ? En français ou en grec biblique, le verbe « recevoir » n’a rien d’extraordinaire, mais dans le contexte de l’Évangile, il devient tout simplement sensationnel : c’est un des mots les plus importants des Écritures.

Premièrement, lorsque deux choses sont contraires ou diamétralement opposées, recevoir l’une revient à rejeter l’autre.

Puisqu’il n’y a aucune affinité ou amitié entre l’Évangile et le monde, recevoir l’Évangile, c’est rejeter le monde. En ceci, nous voyons à quel point cette démarche est radicale. Recevoir l’Évangile et suivre son appel, c’est rejeter tout ce qu’on peut voir avec les yeux et toucher avec les mains en échange de ce qui ne peut être vu[1]. C’est rejeter son indépendance et le droit de s’autogérer pour se soumettre à un Messie qui est mort il y a deux mille ans comme ennemi de l’État et blasphémateur. C’est rejeter l’opinion majoritaire pour rejoindre une minorité insignifiante et fustigée : l’Église. C’est accepter, convaincu que ce prophète transpercé est le Fils de Dieu et le Sauveur du monde, de tout risquer dans cette seule et unique existence. Recevoir l’Évangile, ce n’est pas simplement formuler une prière dans laquelle on demande à Jésus de venir dans notre cœur ; c’est rejeter le monde pour recevoir la plénitude des déclarations du Christ.

Deuxièmement, celui qui reçoit l’Évangile met sa confiance en la personne de Jésus-Christ seul, et dans son œuvre, qui est l’unique moyen de réconciliation avec Dieu.

D’après une maxime largement répandue, il est imprudent, voire dangereux, de se confier en une seule chose. L’homme qui n’a pas de plan B ou d’issue de secours, qui n’a pas diversifié ses investissements, qui a mis tous ses œufs dans le même panier ou brûlé les ponts derrière lui est celui que notre société qualifie d’imprudent. C’est pourtant l’attitude que doit adopter celui qui reçoit Jésus-Christ ; la foi chrétienne est exclusive. Recevoir véritablement le Christ, c’est rejeter toute autre espérance en dehors du Christ seul. C’est la raison pour laquelle l’apôtre Paul a déclaré que le chrétien serait le plus malheureux de tous les hommes si le Christ s’avérait être une supercherie[2]. S’il n’est pas le Sauveur, alors le chrétien, qui n’a d’autre recours ou assurance, est perdu. Par la foi, il a déclaré : « Mon Seigneur, j’ai confiance en toi. Si tu ne peux ou ne veux pas me sauver, alors je trouverai ma place en enfer. Je n’entreprendrai pas d’autres préparatifs ! »

Lorsque l’Évangile est véritablement reçu, on méprise le péché et on s’en détourne, mais on abandonne également toute assurance venant de nous-mêmes ou prenant sa source ailleurs qu’en Christ. C’est la raison pour laquelle une personne véritablement convertie aurait presque la nausée si l’on insinuait que sa réconciliation avec Dieu résulte de sa propre vertu ou de son mérite. Bien que sa nouvelle vie en Christ produise de bonnes œuvres, une personne véritablement convertie ne considère pas ces dernières comme le chemin du salut et ne se confie qu’en la personne et l’œuvre parfaite de Christ.

Troisièmement, recevoir l’Évangile signifie accepter ou exposer sa vie à la seigneurie de Jésus-Christ.

Le mouvement évangélique moderne enseigne souvent que les hommes doivent faire de Jésus le Seigneur de leur vie. Il serait pourtant préférable de leur dire que Jésus est le Seigneur de leur vie, qu’ils se prosternent devant lui avec amour ou serrent le poing contre lui avec haine. Les Écritures déclarent que Dieu a fait Seigneur et Christ cet homme nommé Jésus que nous avons crucifié[3]. Il a oint son Roi sur sa montagne sainte, et se rit de ceux qui se rebelleraient contre lui[4]. Dieu n’appelle pas les hommes pour qu’ils instituent Jésus comme Seigneur (comme s’ils avaient un tel pouvoir), mais pour qu’ils vivent dans une soumission absolue au Seigneur qu’il a lui-même établi. Aussi l’homme qui désire recevoir les bienfaits de l’Évangile doit d’abord accepter de livrer toute son indépendance et son autonomie au Seigneur de l’Évangile.

Nous devons, en tant que prédicateurs de l’Évangile, expliquer clairement les conditions de cette transaction. Nous ne devons pas les minimiser ni les masquer à tel point qu’elles finiraient par être presque indiscernables. Tant que nous n’avons pas expliqué que recevoir Christ est à la fois la chose la plus sensée et la plus dangereuse qui soit, nous manquons d’honnêteté à l’égard des personnes en quête de réponses. Tout compte fait, comme Aslan dans Le Lion, la Sorcière blanche et l’Armoire de C. S. Lewis, Christ n’est pas un lion apprivoisé et ne présentant aucun risque. Il est en droit de demander tout à ceux qui reconnaissent sa seigneurie. Si Jésus invite ceux qui sont fatigués à venir à lui, il peut aussi tout exiger d’eux, y compris les envoyer dans ce monde sombre et déchu pour qu’ils y perdent la vie en son nom[5]. Si l’on ne perçoit pas le danger dans l’appel de l’Évangile, c’est qu’on ne l’a entendu que vaguement. Pourtant, l’entendre et y répondre, par grâce, est la chose la plus sensée qui soit, malgré le danger. Quoi de plus raisonnable que de suivre le Créateur tout-puissant, qui maintient l’univers, qui a aimé son peuple d’un amour sans limite, l’a racheté par son sang et s’est éternellement engagé à accomplir chaque promesse qu’il lui a faite[6] ? Le suivre serait une preuve de sagesse même s’il n’avait pas en lui toute cette bonté, car qui peut résister à sa volonté[7] ? C’est pour ces raisons, et bien d’autres encore, que l’apôtre nous exhorte à « offrir [notre] corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu », ce qu’il qualifie de culte spirituel, voire de culte « raisonnable[8] ».

Quatrièmement, recevoir l’Évangile signifie recevoir une toute nouvelle perception de la réalité, dans laquelle Christ est l’épicentre de toutes choses.

C’est la raison pour laquelle le salut et la vie chrétienne sont qualifiés par les théologiens de christocentriques. Christ devient le centre de notre univers, la source, l’objet, le but et la motivation de tout ce que nous sommes et faisons. L’homme qui reçoit l’Évangile commence à vivre dans une toute nouvelle perspective, et cette perspective est Christ. Si les signes extérieurs ne sont pas éclatants dès l’instant de la véritable conversion, ils deviendront manifestes avec le temps. Tel un caillou jeté au centre d’un lac, les ondes du choc généré par l’Évangile finiront par atteindre tous les recoins de la vie du croyant. Celui qui se dit véritablement converti ne reçoit pas l’Évangile en plus de sa vie passée, mais en lieu et place de celle-ci. Recevoir l’un, c’est perdre l’autre. C’est ce qui ressort clairement de l’enseignement de Jésus : « Car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui la perdra à cause de moi la trouvera[9]. »

Enfin, recevoir l’Évangile signifie que l’on trouve la source et la subsistance de sa vie en Christ.

On ne peut le percevoir comme une simple part de sa vie ou comme un ajout à toutes les autres bonnes choses que l’on possède déjà en dehors de lui. Il n’est pas un petit accessoire qui habille notre vie pour la rendre meilleure. En recevant l’Évangile, le Christ devient notre vie[10].

Il n’y a rien de plus blasphématoire qu’un prédicateur félicitant un non-croyant pour sa vie merveilleuse, exaltant sa réussite avant d’ajouter qu’il lui manque une chose pour que sa vie soit parfaite : Jésus. L’apôtre Paul a agi tout autrement lorsqu’il considérait les choses de sa vie passée, même les meilleures : en comparaison à Christ, celles-ci étaient pour lui comme de la boue[11]. Nous ne devons jamais présenter le Christ au non-croyant comme la cerise sur le gâteau d’une vie déjà merveilleuse. Celui-ci doit comprendre que, sans le Christ, il n’a pas de vie, et que toutes ses réussites personnelles en dehors de Christ sont des monuments à sa propre vanité : des châteaux de sable éphémères.

Jésus enseignait : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez son sang, vous n’avez point la vie en vous-mêmes[12]. » Ces « paroles dures » signifient que le Christ doit être la subsistance de nos vies, et pas simplement un condiment ou un complément à celles-ci[13].

Jésus est pour le croyant la manne qui descend du ciel, le rocher duquel jaillit de l’eau vive au milieu d’un désert, la vigne en qui il demeure et de laquelle il reçoit la vie et la fécondité[14]. Le croyant qui s’est vraiment nourri du Christ cesse de se fatiguer pour ce qui n’est pas du pain et ne rassasie pas. Il continue à rechercher le pain qui descend du ciel, afin d’en manger et de ne point mourir[15].

Le prédicateur de l’Évangile doit, non seulement chercher à ce que les hommes se repentent, mais aussi à ce qu’ils reçoivent l’Évangile. Il ne doit pas seulement démasquer et dénoncer le fourrage insatisfaisant du siècle présent, il doit aussi orienter les hommes vers le seul lieu qui renferme la véritable nourriture. Il doit, à l’instar de David, avertir tous les hommes : « Sentez et voyez combien l’Éternel est bon[16] ! » Le prédicateur de l’Évangile doit également expliquer qu’une personne ayant vraiment trouvé le salut en Christ continuera d’être rassasiée en lui et ne supportera pas l’idée d’en être séparée.


Cet article est tiré du livre : La puissance et le message de l’Évangile de Paul Washer


[1] Hébreux 11.1,7,27 ; 1 Pierre 1.8

[2] 1 Corinthiens 15.19

[3] Actes 2.36

[4] Psaumes 2.4‑6

[5] Matthieu 10.16,39 ; 11.28

[6] Colossiens 1.15‑17 ; Hébreux 1.3 ; Jérémie 31.3 ; Apocalypse 5.9 ; Hébreux 13.5 ; 2 Timothée 2.13 ; 2 Corinthiens 1.20 ; Matthieu 28.20

[7] Romains 9.19 ; 2 Chroniques 20.6 ; Job 9.12 ; Daniel 4.35

[8] Romains 12.1

[9] Matthieu 16.25

[10] Colossiens 3.4

[11] Philippiens 3.7,8

[12] Jean 6.53

[13] Jean 6.60

[14] Jean 6.31‑35,41,47‑51,58 ; 1 Corinthiens 10.4 ; Jean 15.5,6

[15] Ésaïe 55.2 ; Jean 6.50

[16] Psaumes 34.9