La bonne manière de parler de l’élection (Paulin Bédard)

Or, puisque cette doctrine de l’élection divine, selon le très sage conseil de Dieu, a été prêchée par les Prophètes, Jésus-Christ lui-même et les Apôtres, tant aux époques de l’Ancien que du Nouveau Testament, et ensuite rédigée par écrit dans les saintes Écritures, elle doit, encore aujourd’hui, être publiée dans l’Église de Dieu, à laquelle elle est spécialement destinée, avec un esprit de prudence, religieusement et saintement, en temps et lieu, en écartant toute indiscrète recherche des voies du Dieu souverain ; le tout à la gloire du saint nom de Dieu, et pour la vive consolation de son peuple.

Canons de Dordrecht, article I.14

De quelle manière devrions-nous parler de l’élection ? Certains s’aventurent à parler de ce sujet à tort et à travers, sans discernement. Ils spéculent sur les secrets insondables de Dieu en allant au-delà de ce que Dieu nous révèle dans sa Parole. D’autres rejettent avec vigueur cette doctrine qu’ils trouvent irrationnelle et refusent de croire ce qu’ils ne peuvent pas comprendre. D’autres sont mal à l’aise de parler de l’élection. Ils ont presque honte d’avouer qu’ils y croient. Ce serait bon pour les théologiens, mais pas pour être prêché ou discuté en Église. D’autres encore ont peur d’aborder des sujets tels que l’assurance de l’élection, la fausse sécurité ou les fruits de l’élection, ne sachant trop où se situer par rapport à ces questions. Ils préfèrent parler de sujets moins embarrassants comme l’amour de Dieu. Comment donc parler de l’élection ? Devrions-nous même en parler ?

Parlons de l’élection

Oui, certainement ! Nous devons en parler ! Puisque la Bible nous révèle que Dieu a un dessein précis d’élection, nous serions bien mal avisés de vouloir taire ou cacher cette doctrine. « Or, puisque cette doctrine de l’élection divine, selon le très sage conseil de Dieu, a été prêchée par les Prophètes, Jésus-Christ lui-même et les Apôtres, tant aux époques de l’Ancien que du Nouveau Testament, et ensuite rédigée par écrit dans les saintes Écritures, elle doit, encore aujourd’hui, être publiée dans l’Église de Dieu, à laquelle elle est spécialement destinée » (I.14). Il nous faut bien sûr rejeter « les discussions folles et ineptes » (2 Ti 2.23, Colombe), « car elles sont inutiles et vaines » (Tit 3.9). Puisque Dieu nous a révélé cette doctrine, ce n’est pas à moi de dire que c’est trop compliqué ou sans importance. Dieu nous en parle, alors parlons-en nous aussi.

« Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire, […] afin que l’homme de Dieu soit accompli et propre à toute bonne œuvre » (2 Ti 3.16,17).

Paul avait attesté aux anciens d’Éphèse qu’il avait bien exercé son ministère de prédicateur. « Je vous déclare aujourd’hui que je suis pur du sang de vous tous, car je vous ai annoncé tout le conseil de Dieu, sans en rien cacher » (Ac 20.26,27). C’est la responsabilité des pasteurs d’enseigner tout le dessein de Dieu, incluant la doctrine de l’élection, et c’est la responsabilité des croyants de l’étudier et de croire tout ce que Dieu nous dit. Si nous négligeons d’enseigner une partie du conseil de Dieu, nous devenons infidèles et nous faisons preuve de grande ingratitude envers Dieu. Le Seigneur, dans sa grâce, a bien voulu nous révéler ces vérités glorieuses pour l’édification de son peuple.

Il ne s’agit pas de toujours prêcher sur l’élection, mais c’est très réconfortant de savoir qu’on n’a pas besoin de « vendre l’Évangile » ou d’essayer de rendre Jésus intéressant par des « trucs » ou des bonbons. Quand la Parole est proclamée, soyons sûrs que les brebis entendront la voix du bon Berger et qu’elles le suivront. Notre responsabilité est d’être fidèles, pas d’avoir du succès ni de prêcher ce que les gens veulent bien entendre.

Parlons-en prudemment et saintement

Mais comment prêcher cette doctrine ? Comment en parler aux autres ? « Avec un esprit de prudence, religieusement et saintement, en temps et lieu, en écartant toute indiscrète recherche des voies du Dieu souverain » (I.14). N’en parlons pas à la légère ! Il s’agit de la gloire de Dieu et de ses voies insondables. « Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies, dit l’Éternel. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées » (És 55.8,9). Rappelons-nous toujours que la doctrine de l’élection est au-delà de toute compréhension humaine.

Il y a bien des choses que je suis appelé à croire sans les comprendre. Tout ce que Dieu nous a révélé est certain et digne d’être cru et enseigné, mais Dieu ne nous a pas tout révélé.

« Les choses cachées sont à l’Éternel, notre Dieu ; les choses révélées sont à nous et à nos enfants, à perpétuité, afin que nous mettions en pratique toutes les paroles de cette loi » (De 29.29).

Lorsque la raison humaine cherche trop à s’élever pour analyser les secrets de Dieu, elle fait preuve d’une grande audace et s’égare immanquablement. La curiosité des hommes rend l’élection encore plus obscure, compliquée et même périlleuse. Il nous faut donc en parler avec beaucoup de sagesse et de prudence, dans un esprit d’humilité, en nous limitant à ce que Dieu nous a révélé, sans chercher à fouiller dans les secrets qu’il a jugé sage de tenir cachés. Cette même prudence doit aussi nous rendre sensibles aux luttes et aux besoins des autres, car c’est un sujet qui peut troubler ou produire des doutes. Bref, n’ajoutons rien et ne retranchons rien de ce que Dieu nous a révélé dans les Écritures saintes.

Parlons-en pour glorifier Dieu

N’oublions pas que Dieu nous a révélé cette doctrine pour que nous la proclamions dans deux buts précis : « le tout à la gloire du saint nom de Dieu, et pour la vive consolation de son peuple » (I.14). Lorsque nous parlons de l’élection, demandons-nous dans quel but nous voulons le faire. Est-ce pour glorifier Dieu et réconforter les croyants, ou est-ce comme un exercice intellectuel qui risque de causer la confusion ? Notre premier but devrait toujours être la gloire de Dieu. La Bible ne parle pas de l’élection comme d’une chose à craindre ou à éviter à tout prix, mais comme d’un sujet de gloire et de joie profonde.

Jésus a loué son Père de ce qu’il a caché ces choses aux sages et aux intelligents et de ce qu’il les a révélées aux enfants (Mt 11.25-27). Paul rend gloire à Dieu de nous avoir choisis depuis toute éternité.

« Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ ! En lui Dieu nous a élus avant la fondation du monde. […] Il nous a prédestinés dans son amour à être ses enfants d’adoption par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté, pour célébrer la gloire de sa grâce dont il nous a favorisés dans le bien-aimé. […] En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant le plan de celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté, afin que nous servions à célébrer sa gloire » (Ép 1.4-6,11-12).

Voilà précisément le but ultime de notre prédestination : que nous servions à célébrer sa gloire !

Nous devrions parler de l’élection dans le but de louer Dieu. Il a choisi un pécheur comme moi pour être son enfant. Quelle grâce infinie dont je suis totalement indigne ! Moi qui mérite d’être éternellement puni en enfer, il m’a choisi depuis toute éternité pour que je lui appartienne pour toujours. Que son amour est grand ! Que ses pensées sont insondables ! Il n’y a rien qui rende davantage gloire à Dieu que de prêcher qu’il est la source de toute bénédiction.

Parlons-en pour consoler le peuple de Dieu

Notre deuxième but devrait être le bien de son peuple. Nos frères et sœurs ont besoin de se rappeler que, si Dieu a trouvé en lui-même la raison de nous choisir, alors notre salut ne dépend nullement de nous. Nous avons besoin de la grâce souveraine. Lorsque Jésus a loué son Père d’avoir caché ces choses aux sages et aux intelligents et de les avoir révélées aux enfants, c’était pour encourager ceux qui ne sont ni sages ni intelligents (Mt 11.25-27). En même temps, Jésus a lancé à tous sans distinction cette grande invitation : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos » (Mt 11.28). La proclamation de l’élection ne devrait jamais être séparée d’un appel à tous, car il plaît à Dieu d’accomplir son plan de rédemption par le moyen de la proclamation de l’Évangile qui appelle tous les hommes à se repentir et à croire.

Pour les croyants, l’élection est une source de vive consolation. Paul a dit à ses frères de Thessalonique qu’ils ont été élus pour les encourager à continuer au milieu des épreuves (1 Th 1.4-7). Ils n’avaient aucun sujet de se glorifier d’avoir reçu l’Évangile et pouvaient trouver un puissant encouragement à persévérer dans la foi.

« Nous devons à votre sujet rendre continuellement grâces à Dieu, parce que Dieu vous a choisis dès le commencement pour le salut, par la sanctification de l’Esprit et par la foi en la vérité. C’est à quoi il vous a appelés par notre Évangile, pour que vous possédiez la gloire de notre Seigneur Jésus-Christ. Ainsi donc, frères, demeurez fermes, et retenez les instructions que vous avez reçues. […] Que notre Seigneur Jésus-Christ lui-même, et Dieu notre Père, qui nous a aimés, et qui nous a donné par sa grâce une consolation éternelle et une bonne espérance, consolent vos cœurs, et vous affermissent en toute bonne œuvre et en toute bonne parole ! » (2 Th 2.13-17.)

Il y a de l’espoir

Quel réconfort et quel encouragement nous pouvons communiquer à nos frères et sœurs dans l’Église ! Nous n’avons pas besoin de chercher à plaire à Dieu par nos propres efforts. Dieu a tout fait et il continue de tout faire pour nous sauver en Jésus-Christ. Par conséquent, demeurons fermes et encourageons-nous à être zélés pour Dieu et pour l’Évangile. Parlons également de l’élection aux autres chrétiens que nous rencontrons pour qu’ils apprécient davantage les bénédictions que nous avons en Jésus-Christ. Car la doctrine de l’élection procure d’immenses bienfaits et fait toute la différence dans nos vies ! Là où la grâce de Dieu est en action, là se trouve la plus grande consolation de son Église.


Cet article est tiré du livre : Le solide fondement du salut de Paulin Bédard