Les bienfaits pratiques d’être certain de notre élection (Paulin Bédard)

De la certitude et de l’appréhension intérieures de cette élection, les enfants de Dieu prennent de jour en jour une plus grande matière de s’humilier devant Dieu, d’adorer l’abîme de ses miséricordes, de se purifier eux-mêmes ; d’aimer aussi très ardemment de leur côté celui qui, le premier, les a tellement aimés.

Il s’en faut donc de beaucoup que, par cette doctrine de l’élection et par sa méditation, ils soient rendus plus paresseux, ou charnellement nonchalants à garder les commandements de Dieu. C’est ce qui arrive ordinairement, par un juste jugement de Dieu, à ceux qui, ou présumant témérairement, ou jasant à plaisir et avec pétulance de la grâce de l’élection, ne veulent point cheminer dans les voies des élus.

Canons de Dordrecht, article I.13

N’est-ce pas dans la nature humaine de facilement se relâcher ? Un travailleur qui est assuré de garder son emploi risque fort de travailler avec moins d’ardeur que celui qui doit faire ses preuves. De même, un chrétien assuré de son élection ne risque-t-il pas de servir le Seigneur avec moins de zèle ? Le fait que Dieu nous ait choisis par pure grâce pour être ses enfants ne conduit nullement à la nonchalance, mais produit de bons fruits dans nos vies.

Pourquoi être certain de notre élection ?

L’article I.13 nous explique pourquoi nous devrions être certains de notre élection. À quoi cela va-t-il me servir de connaître l’élection ? Ce n’est pas seulement un exercice intellectuel. Plus nos cœurs seront remplis de cette vérité, plus cette dernière produira des bienfaits pratiques dans nos vies. Quels sont donc les bienfaits de savoir que nous sommes élus ? « De la certitude et de l’appréhension intérieures de cette élection, les enfants de Dieu prennent de jour en jour une plus grande matière de s’humilier devant Dieu, d’adorer l’abîme de ses miséricordes, de se purifier eux-mêmes ; d’aimer aussi très ardemment de leur côté celui qui, le premier, les a tellement aimés » (I.13).

L’humilité

La certitude de notre élection devrait nous inciter à l’humilité. Plusieurs disent au contraire que la doctrine de l’élection inciterait les enfants de Dieu à l’arrogance. Lorsqu’une personne est choisie pour un emploi, pour faire partie d’une équipe ou pour occuper une position d’honneur, n’a-t-elle pas de bonnes raisons de se penser supérieure aux autres ? Si nous pensons que Dieu nous a choisis plutôt que d’autres, cela nous pousserait à nous croire supérieurs. Une telle accusation concernant l’élection est totalement absurde.

Rappelons-nous que tous les hommes ont péché en Adam et que nous méritons tous la mort éternelle. Aucun d’entre nous ne mérite d’être sauvé. Mais Dieu, selon la richesse de sa grâce et par son bon plaisir souverain, en a choisi certains au salut éternel sans tenir compte de nos péchés. Dieu ne sauve pas des hommes à cause de leur valeur intrinsèque ou parce qu’ils auraient en eux-mêmes le pouvoir de croire en lui. Dieu sauve des hommes parce qu’il le veut bien, un point c’est tout.

Nous ne sommes pas meilleurs que les autres

Il n’y a là aucune raison de s’enorgueillir, bien au contraire ! « Car qui est-ce qui te distingue ? Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi te glorifies-tu, comme si tu ne l’avais pas reçu ? » (1 Co 4.7.) Toute arrogance est exclue ! Sa grâce dépend uniquement de son bon plaisir. Nous avons toutes les raisons de nous humilier devant Dieu.

« Considérez, frères, que parmi vous qui avez été appelés il n’y a ni beaucoup de sages selon la chair, ni beaucoup de puissants, ni beaucoup de nobles. Mais Dieu a choisi les choses folles du monde pour confondre les sages ; Dieu a choisi les choses faibles du monde pour confondre les fortes ; et Dieu a choisi les choses viles du monde et celles qu’on méprise, celles qui ne sont point, pour réduire à néant celles qui sont, afin que personne ne se glorifie devant Dieu » (1 Co 1.26-29).

C’est en réalité la position arminienne qui comporte le danger de produire un sentiment d’orgueil. Si l’on croit que l’homme joue un rôle dans son salut et que Dieu nous a sauvés à cause de notre « décision », il y a là danger d’arrogance. N’allons-nous pas nous croire un peu plus sages ou spirituels que les autres qui n’ont pas choisi Dieu ? Heureusement, par la grâce de Dieu, bien des arminiens sont très humbles ! Nous, les réformés, devrions avoir honte de ne pas toujours vivre de façon conséquente avec ce que nous croyons.

Dieu est pur et sa Parole est pure, mais nous sommes impurs. Israël s’était pensé supérieur aux autres du fait qu’il était le peuple choisi. Quelle erreur ! Une telle attitude risque de nous faire perdre le désir d’aller vers ceux qui sont perdus et d’éteindre en nous tout sentiment de compassion envers eux. N’oublions jamais à quelle misère nous avons été arrachés et quelle grâce le Seigneur nous a accordée ! Nous ne sommes pas meilleurs qu’une prostituée ou un meurtrier en série. Nous devrions garder espoir pour ces gens perdus, prier que Dieu en sauve encore beaucoup d’autres selon son bon plaisir et marcher humblement avec Dieu.

L’adoration

L’élection devrait nous pousser à l’adoration. Paul présente avec force la vérité glorieuse de l’élection dans Romains 9 à 11 et dans Éphésiens 1 ; dans ces deux textes, Paul est rempli de louange et d’adoration.

« Ô profondeur de la richesse, de la sagesse et de la science de Dieu ! Que ses jugements sont insondables, et ses voies incompréhensibles ! Car qui a connu la pensée du Seigneur, ou qui a été son conseiller ? Qui lui a donné le premier, pour qu’il ait à recevoir en retour ? C’est de lui, par lui et pour lui ! À lui la gloire dans tous les siècles. Amen ! » (Ro 11.33-36.)

« Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ. […] En lui, Dieu nous a élus […] pour célébrer la gloire de sa grâce » (Ép 1.3-6). Voilà le but principal de notre élection ! Célébrer la gloire de sa grâce ! « En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés […] afin que nous servions à célébrer sa gloire » (Ép 1.11,12).

Pourquoi l’élection nous pousse-t-elle à l’adoration ? Nous étions spirituellement morts, nous étions ennemis de Dieu, nous n’avions aucun intérêt pour lui. Nous méritions sa juste colère. Lui, il a choisi de nous aimer malgré tout, depuis toujours, au prix du sacrifice de son Fils. Quelle puissante motivation à l’adorer de toutes nos forces !

La purification

L’élection devrait nous inciter à nous purifier. « Dieu nous a élus pour que nous soyons saints et irréprochables devant lui » (Ép 1.4). Notre destinée éternelle, c’est la sainteté parfaite à la gloire de Dieu. Quelle excellente raison de nous préparer à notre destination ! Ceux qui rejettent l’élection disent que cette doctrine rend paresseux et négligent. Puisque tout est décidé d’avance, à quoi bon faire des efforts ? Peu importe comment on vit, de toute manière, cela ne changera rien. Encore un raisonnement tordu ! La Bible dit tout le contraire. Si je suis certain de mon élection, je vais m’efforcer de produire des fruits de reconnaissance. Comme l’a dit Jean Calvin, ils sont inséparables, tout comme le soleil et la lumière qu’elle produit.

Si nous avons été sauvés par pure grâce, c’est « pour des bonnes œuvres que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions » (Ép 2.10). Dieu a préparé d’avance pour ses élus des bonnes œuvres à pratiquer. Jésus a dit que l’on connaît un arbre à ses fruits. Si le cœur d’une personne est transformé parce que Dieu l’a élue, cette personne produira de bons fruits. « Ainsi donc, comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, revêtez-vous de sentiments de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience. Supportez-vous les uns les autres, et, si l’un a sujet de se plaindre de l’autre, pardonnez-vous réciproquement » (Col 3.12 ; voir 1 Th 5.8-11).

Notre assurance ne nous donne pas la liberté de devenir négligents

Quand nous savons que le salut est entièrement l’œuvre de Dieu, nous avons confiance qu’il nous donnera la force de le servir. « Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement. […] Car c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire selon son bon plaisir. Faites toutes choses sans murmures ni hésitations, afin que vous soyez irréprochables et purs, des enfants de Dieu irréprochables… » (Ph 2.12-15.) C’est encourageant de faire des efforts, car Dieu m’a promis la force de son Esprit !

L’amour pour Dieu

L’élection devrait nous inciter à aimer Dieu davantage. « Nous l’aimons, parce qu’il nous a aimés le premier » (1 Jn 4.19). L’élection signifie que Dieu nous a aimés le premier. Si Dieu ne nous avait pas aimés le premier, il nous serait impossible d’avoir quelque amour pour lui. L’amour de Dieu pour nous et en nous est la source de notre amour pour lui. « L’amour de Dieu répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné » (Ro 5.5). Comment vais-je répondre en retour ? En aimant Dieu ardemment de tout cœur. Si je suis certain de mon élection, je vais chérir dans mon cœur l’amour éternel de Dieu pour moi comme le trésor le plus précieux. « Il s’en faut donc de beaucoup que, par cette doctrine de l’élection et par sa méditation, ils soient rendus plus paresseux, ou charnellement nonchalants à garder les commandements de Dieu » (I.13).

Il y a toutefois des hypocrites dans l’Église qui se pensent certains de leur élection, soit parce qu’ils sont dans l’Église depuis des années, parce qu’ils ont occupé des fonctions ou parce qu’ils reçoivent des compliments. Ce ne sont pas des preuves en soi. « Présumant témérairement, ou jasant à plaisir et avec pétulance de la grâce de l’élection, ils ne veulent point cheminer dans les voies des élus » (I.13). Jésus a bien averti les Juifs de ne pas entretenir de fausse sécurité (Lu 6.24-26). Chacun de nous devrait regarder aux fruits qu’il porte. Suis-je content de moi-même, ou est-ce que je m’attriste de mes péchés et me réjouis de la grâce de Dieu pour moi ? Vivons dans l’humilité, adorons le Seigneur pour son immense miséricorde, purifions-nous de nos péchés, aimons le Seigneur de tout notre cœur. Marchons fidèlement dans la voie de l’élection.


Cet article est tiré du livre : Le solide fondement du salut de Paulin Bédard