Un monde qui demande « Qu’est-ce que la vérité ? » (Michel Varton)

La perte de la vérité

Le marxisme et l’islamisme (et les autres religions) imposent leur vérité. Mais qu’en est-il de notre monde moderne ? Le problème, chez nous, semble inverse : l’absence ou la perte de la vérité. Dans notre monde « post-chrétien », le terme « post-vérité » a été élu mot de l’année en 2016. Sans absolu, tout devient relatif. La vérité devient désuète. La post-vérité se définit ainsi : « Relatif à des circonstances dans lesquelles les faits objectifs ont moins d’influence pour former l’opinion publique que l’appel à l’émotion et aux croyances personnelles ». Cette attaque contre la vérité découle de deux sources : la philosophie postmoderne et la technologie moderne.

La philosophie postmoderne

Quand la vérité est perdue, elle n’a plus d’importance. Dans ce monde de post-vérité, des hommes et des femmes politiques ne se sentent plus obligés de dire la vérité, comme cela est régulièrement manifeste lors des campagnes présidentielles. Même en France, les promesses électorales n’engageraient que… ceux qui les reçoivent. Pour le président turc Erdogan, démocratie et liberté d’expression sont incompatibles entre elles.

La technologie moderne

La seconde raison se trouve dans la technologie moderne. Dans notre monde connecté, la vérité se perd également. Il n’est même plus possible de la distinguer. La post-vérité provient du surplus d’informations, véhiculées par les réseaux sociaux. Ces derniers se sont adaptés aux goûts des personnes. Leurs algorithmes nous permettent d’accéder uniquement à ce que nous voulons croire ou entendre. De nouveau, l’important n’est pas l’objectivité, mais le nombre de clics que l’article peut générer. Cela s’appelle le clickbait (ou : « appât à clics »).

Dans cette cacophonie d’informations, nous ne sommes plus capables de distinguer les vraies nouvelles des fausses. Dans notre nouveau monde, la censure ne résulte plus d’un déni d’accès à l’information, mais d’une inondation d’autres vérités :

« En fournissant tellement d’informations “gratuites”, [les grandes sociétés technologiques] étranglent les fournisseurs classiques qui investissent pour délivrer les nouvelles qui informent les citoyens. En utilisant des algorithmes qui se basent sur des préférences préenregistrées, ils fournissent uniquement les informations correspondant à leurs préjugés ; colère de droite pour ceux qui sont de droite et colère de gauche pour ceux qui sont de gauche ».

La vérité identitaire

Comme dans l’Empire romain, le besoin impératif de maintenir la paix sociale prime. Dans notre monde occidental, le populisme, les extrêmes politiques menacent aussi l’équilibre des sociétés et fragilisent notre pax romana. Une nouvelle fracture sociétale est apparue, qui a pris au dépourvu le monde politique construit sur l’opposition classique gauche-droite. La société se divise par des guerres de culture, qui opposent les valeurs conservatrices aux valeurs libérales sociales. C’est une division identitaire, entre les anywhere et les somewhere, selon l’expression du journaliste David Goodhart (nous pourrions en parler aussi comme du clivage entre « l’élite hyper mobile » et les « gilets jaunes »). La société ne tolère plus que ce qu’elle considère comme actuellement tolérable. Si la vérité objective n’existe plus, ce qui compte est la vérité identitaire, existentielle. C’est cette vérité-là qui risque d’entrer en conflit avec l’Évangile.

C’est donc dans un tel monde que nous avons la mission de proclamer la vérité, d’être témoins des valeurs que Dieu exige de sa création. Dans un monde en plein conflit de valeurs, où la vérité identitaire a toute son importance.


Cet article est tiré du livre : Comme le père m’a envoyé de Michel Varton