L’universalisme est vivant et en bonne santé. Comment s’y opposer ? (John Piper)
Nous sommes ici pour vous parler, Michael J. McClymond, de votre nouveau livre. Nous avons parlé il y a six ans, et en passant, vous avez dit que vous commenciez un nouveau projet sur l’histoire de l’universalisme. Je n’avais aucune idée que cela deviendrait une œuvre massive en deux volumes. Il s’agit d’une œuvre de 1 400 pages intitulée « The Devil’s Redemption: A New History and Interpretation of Christian Universalism » (trad. « La rédemption du diable : Une nouvelle histoire et interprétation de l’universalisme chrétien »), désormais disponible chez Baker Academic. Quel incroyable accomplissement. Parlez-nous donc de l’universalisme chrétien. Tout d’abord, qu’est-ce que l’universalisme chrétien ?
Eh bien, tout d’abord, il faut commencer par le mot universalisme. L’universalisme, tout simplement, revêt des significations différentes selon les contextes. Dans le contexte de la théologie, c’est l’idée qu’à la fin tout le monde est sauvé. Cela signifierait tous les êtres humains, chaque individu, sans exception. Ce salut pourrait aussi être étendu aux anges déchus. Les anges non déchus ne seraient pas sauvés, mais les anges déchus – Satan et les démons – seraient également sauvés. Telle serait la définition si vous adhériez à un universalisme intégral.
L’universalisme chrétien pourrait ajouter quelque chose à cela, en affirmant que tout ce salut se fait dans et par Christ. L’universalisme chrétien se distingue donc d’un universalisme interreligieux. On retrouve beaucoup cet universalisme interreligieux dans la culture actuelle. C’est l’idée que tous les chemins mènent à Dieu, et qu’il n’est pas nécessaire de venir à Dieu par Christ. Un universalisme chrétien dit : « Non, il faut que ce soit par Christ. D’une manière ou d’une autre, par Christ, tous seront sauvés. »
Quand vous écrivez, vous sensibilisez les gens à un sujet. Quelles sont quelques-unes des différentes formes d’universalisme chrétien que vous avez découvertes ?
Eh bien, c’est une longue histoire. L’une des raisons pour lesquelles le livre est si long est que la question du salut final s’entrelace avec des questions sur la doctrine de l’expiation, du libre arbitre, de l’élection, etc. Il n’y a presque aucune doctrine majeure qui ne fasse pas partie de la discussion au sujet de l’universalisme.
Je pense que la situation actuelle est très éclectique. Je dis dans mon livre qu’il y a beaucoup de bancs de poissons qui nagent dans l’étang universaliste. Beaucoup d’universalistes ont en commun l’idée d’un salut final pour tous, mais il y a des différences majeures entre eux. Ils argumentent tous de manières très différentes. Certains se fondent principalement sur le libre choix de l’homme, d’autres sur l’élection divine, ou sur le type d’universalisme « barthien » qui se concentre sur le dessein ultime de Dieu qui d’une manière ou d’une autre atteindra son but. Ensuite, il y a diverses formes d’une sorte d’universalisme gnostique, ésotérique, dans lequel chacun a une étincelle du divin qui est destinée à retourner à Dieu.
Il y a beaucoup de variations. Je pense en fait que les universalistes ne sont peut-être pas conscients à quel point ils diffèrent entre eux.
En parlant de Karl Barth, vous avez fait du bon travail en montrant que sa doctrine de l’élection est problématique ici. Il encode essentiellement l’universalisme dans l’ADN de sa théologie par le biais de l’élection universelle. Votre livre est une étude historique massive qui s’étend sur des décennies et des siècles, mais quel est l’état actuel de l’universalisme chrétien en Occident aujourd’hui ?
J’ai l’impression qu’Internet et les médias sont aujourd’hui des acteurs très importants dans la promotion de l’universalisme. Il y a certainement beaucoup de livres à ce sujet. Si l’on va sur Amazon et que l’on tape « universalisme chrétien », on obtiendrait un grand nombre de livres populaires, dont beaucoup ont été publiés au cours des vingt dernières années. Depuis 1999 environ, donc au cours du nouveau millénaire, on assiste à un essor étonnant de la nouvelle littérature populaire.
Si vous deviez examiner le monde dans son ensemble pour trouver un centre de distribution numérique en ligne, il se trouve en fait ici au Missouri – Hermann, Missouri. C’est un site d’agrégation appelé « Tentmaker ». C’est un peu comme la fondation du mur universaliste, parce qu’ils hébergent beaucoup de liens vers de la littérature universaliste.
Je crois comprendre que Gary Amirault a découvert l’universalisme du XIXe siècle et qu’il s’y est intéressé de très près. Je pense qu’il avait été missionnaire à un moment donné. Il y a une énorme quantité de matériel sur ce site-là.
Il y a aussi un autre site appelé « The Evangelical Universalist Forum » (trad. « Le forum évangélique universaliste »). J’ai fait un truc fou avec ce site. J’ai consulté ce site Web et j’ai trouvé qu’il y avait 100 000 mots de commentaires sur une des premières conférences que j’ai données à la Trinity Evangelical Divinity School à ce sujet. Je me suis connecté sous mon propre nom, et soudain, des dizaines et des dizaines de personnes m’ont posé des questions. C’était vraiment épuisant. J’ai dû me désengager à ce moment-là. Qui sait, peut-être que je me réengagerai à un moment donné après qu’ils auront jeté un coup d’œil au livre.
L’universalisme est vivant et en bonne santé.
Il est vivant et en bonne santé. Un homme de ma congrégation m’a récemment emmené déjeuner. C’est un riche homme d’affaires à la retraite, qui tenait une église dans sa maison. On est assis autour d’un déjeuner, et il a une application sur son téléphone. Il commence alors à lire quelque chose qui s’appelle la « Mirror Bible » (trad. la « Bible en miroir »). La Bible en miroir dit que la seule différence entre Jésus et nous est que Jésus connaissait et comprenait sa propre identité. C’est un enseignement très gnostique. C’est l’idée que nous avons tous Dieu en nous, ou que nous sommes tous identiques à Dieu. Telle doctrine enseigne que nous sommes éternels dans notre nature essentielle.
Il a commencé à lire à partir de l’app, et ce monsieur dans mon église essayait en fait de faire adhérer mon propre pasteur à des vues universalistes. Ce livre que j’ai écrit pour tout le monde, tout à coup, touchait littéralement la personne à côté de moi sur le banc, dans ma propre congrégation. Cette doctrine m’a touché de près.
Effrayant. J’imagine que les leaders d’église vous entendent raconter cette histoire, et qu’ils veulent s’assurer de manière proactive que l’universalisme ne s’installe pas dans leurs propres églises. Que dites-vous aux pasteurs ?
En fait, il y a environ un an et demi, j’ai rencontré une cinquantaine de pasteurs locaux de la région de Saint-Louis. Je leur ai posé cette question : « Quelle serait votre réponse pastorale à l’universalisme ? » Ce qu’ils ont proposé est en fait fondamentalement la même réponse que celle à laquelle je suis parvenu par le biais de mes propres recherches.
Pour le dire très brièvement, prêchez la croix. Si la croix est prêchée dans toute sa profondeur, sa richesse et son intégrité, alors elle nous montre la sainte haine et l’opposition de Dieu au péché, et son amour profond qui était prêt à supporter le poids destructeur du péché pour nous racheter.
Si vous prêchez la croix correctement, tant de problèmes théologiques se résolvent d’eux-mêmes. Je pense que l’une des raisons pour lesquelles l’universalisme émerge dans les églises est que nous n’avons pas prêché la croix. La croix nous montre que notre salut n’est pas venu à bon marché, qu’il est venu à un prix très élevé.
Je recommanderais le merveilleux livre de John Stott, « La croix de Jésus-Christ », qui est vraiment une étude multidimensionnelle qui examine la croix et la souffrance, la croix et le problème du mal, et la croix dans la vie chrétienne. Pour quelqu’un qui dit : « J’aimerais commencer à mettre la croix au centre de ma prédication », ce livre pourrait donner quelques indices sur la façon de le faire.
Excellent, c’est un très bon livre. Notre interview touche à sa fin. Merci beaucoup.
Pasteur John Piper vous répond présente les réponses que le pasteur John Piper donne à des questions théologiques et pastorales difficiles. Ce podcast, créé en partenariat avec Desiring God, vous est offert par Revenir à l’Évangile, un blog et un ministère de Publications Chrétiennes. Pasteur John répondra à deux questions chaque semaine. Vous pourrez entendre ses réponses sur notre blog, Facebook, Youtube, Apple Itunes Store et sur l’appareil que vous utilisez pour écouter des podcasts