Les chrétiens et l’environnement (Tim Challies)

Je suis plutôt sceptique en ce qui concerne plusieurs affirmations des environnementalistes à propos du réchauffement climatique. Cependant, ce scepticisme à l’égard des pronostics sombres et pessimistes ne signifie pas que je ne me soucie pas de la planète sur laquelle nous vivons. En fait, c’est tout le contraire. Je veux que mon scepticisme me permette de trouver de meilleures solutions que celles proposées par le mouvement vert. Je veux que mon diagnostic du problème et ma compréhension des solutions soient fondés sur la Bible. À ce sujet, Francis Schaeffer et son livre La pollution et la mort de l’homme (Cruciforme, 2015) m’ont beaucoup aidé. C’est encore, à mon avis, l’un des meilleurs livres qui offrent une perspective chrétienne sur la manière dont nous devrions prendre soin de la création.

Schaeffer commence en affirmant que les chrétiens, contrairement aux humanistes non chrétiens d’aujourd’hui, reconnaissent que Dieu a appelé l’humanité à exercer sa domination sur toute la terre. Nous ne sommes pas ici par hasard et nous ne sommes pas ici par erreur. Nous avons été placés ici par Dieu pour prendre soin de cette planète et nous avons été appelés à en être de fidèles intendants. Cependant, notre capacité d’exercer ce genre d’intendance a été affectée par notre état de péché.

« … il est vrai que l’homme a reçu le pouvoir de dominer sur la création. Mais depuis la chute il fait un mauvais usage de ce pouvoir ; il est en état de révolte et il s’est placé lui-même au centre de l’univers. Il se considère comme un être autonome, et croit qu’il a le droit d’exploiter les créatures comme si elles n’étaient rien en elles-mêmes » (p. 66-67).

Nous avons cessé de prendre soin du monde avec amour et fidélité. Nous le ravageons et le pillons. Bien que nous ne croyions peut-être pas à toutes les terribles affirmations sur l’état de notre planète et son avenir périlleux, nous devons au moins reconnaître que nous n’avons pas pris soin du monde comme Dieu nous y a appelés.

Les réponses à cette crise ne se trouvent pas dans nos propres efforts ni dans les opinions des politiciens. Au contraire, si nous voulons comprendre la crise, ses racines et ses solutions, nous devons nous tourner vers l’Écriture. C’est précisément ce que fait Schaeffer. Bien que son livre ait été publié pour la première fois en 1970, il se lit comme s’il avait été écrit hier (si, du moins, le lecteur est prêt à remplacer les enjeux écologiques d’il y a trente ans par ceux d’aujourd’hui, en substituant peut-être les discussions autour des pesticides par celles concernant le réchauffement climatique).

Schaeffer a observé son époque et il a examiné la manière dont les gens traitaient les questions écologiques. Il a fait preuve de perspicacité lorsqu’il a affirmé que l’écologie engendre forcément une sorte de panthéisme lorsque celle-ci est dépourvue de tout fondement biblique solide et de tout fondement moral cohérent. Schaeffer a compris que les gens en viendraient rapidement à faire face aux problèmes environnementaux en cherchant à « ne faire qu’un avec la planète », et cela bien des décennies avant le film Avatar.

Dans son livre, il nous fait part de cette réflexion typiquement schaefferienne : « Dans les prochaines années, [le panthéisme sera] présenté comme la seule solution possible aux problèmes écologiques [et] sera un élément de plus de la pensée orientale que l’Occident adoptera » (p. 20). Près de quarante ans plus tard, ses paroles se sont avérées exactes. Nous pouvons observer aujourd’hui comment le mouvement vert gagne en popularité parallèlement à certaines pratiques orientales, comme le yoga.

Le panthéisme a élevé la nature, abaissé l’homme et rejeté Dieu. En fait, cela est nécessaire à la pensée panthéiste :

« On nous demande de bien traiter la nature pour cette seule raison : qu’elle a des effets sur l’homme, mes enfants et les générations à venir… En réalité, [cela consiste à] placer l’homme dans une position absolument égocentrique face à la nature… Dépourvu d’absolus, l’homme moderne est aussi dépourvu de catégories. [Cela dit], des catégories sont indispensables à toute réponse véritable et les seules catégories dont ces hommes disposent ne dépassent pas le pragmatisme et la technologie… Le panthéisme rabaisse toujours l’homme au lieu de l’élever » (p. 24, 25, 31).

En fin de compte, le panthéisme précipite l’homme et la nature dans une sorte de bourbier, nous laissant incapables de faire la moindre distinction nécessaire et rationnelle entre nous et le monde qui nous entoure.

La Bible nous offre une vision bien meilleure et bien plus élevée de nous-mêmes, de notre planète et de notre responsabilité envers elle. Selon Schaeffer, notre compréhension doit commencer par l’acte de création de Dieu, par lequel il a créé des choses qui ont une existence objective en soi. Malgré les prétentions du panthéisme, la création n’est pas une extension de l’essence de Dieu. C’est seulement la vision biblique qui donne de la valeur à l’homme et à tout ce que Dieu a créé. Pourquoi ? Parce que nous comprenons mieux l’être humain et la nature lorsque nous voyons que, tout en étant séparés de la nature, l’être humain est lié à elle en étant lui-même une création de Dieu.

« Le chrétien traite donc les choses avec intégrité parce qu’il ne croit pas à leur autonomie. Le dilemme que connaît l’homme d’aujourd’hui est dû au fait qu’il a rendu toutes choses autonomes vis-à-vis de Dieu » (p. 49). Nous aimons la création parce que nous aimons le Créateur. En aimant la création, nous exprimons notre amour envers le Créateur.

Même dans les années 1970, Schaeffer écrivait :

« Il nous faut confesser que nous avons déjà laissé passer des occasions d’intervenir : nous nous sommes bruyamment élevés contre la science matérialiste, mais nous avons peu fait pour montrer qu’en pratique, en tant que chrétiens, nous ne laissons pas la technologie nous dicter notre attitude envers l’homme ou la nature » (p. 80).

Schaeffer nous a fait cette mise en garde : « Si nous n’accordons pas une valeur intrinsèque à la nature, c’est notre propre valeur qui en sera diminuée » (p. 82). Au final, il nous exhortait à bien traiter la nature parce que nous sommes tous des produits du Créateur aimant ; nous sommes tous des créatures.

Tout en reconnaissant que le péché et ses effets ne seront pas éradiqués tant que le Seigneur ne reviendra pas, Schaeffer croyait qu’il pouvait et devait y avoir une guérison « réelle et visible » de la planète et de son environnement (p. 63). Il disait « qu’en vertu de l’œuvre de Christ, [le christianisme] devrait être capable d’apporter un renouveau sensible dès à présent, sur le plan individuel, aussi bien que sur le plan social, dans chaque domaine touché par la Chute » (p. 62-63).

En tant que chrétiens, nous sommes particulièrement appelés à traiter la création comme elle sera traitée dans l’éternité. Voilà, je pense, notre défi : traiter la planète aujourd’hui comme nous traiterons la nouvelle terre, c’est-à-dire exercer la domination sans piller, exploiter sans détruire et gérer fidèlement ce grand don de Dieu.


Cet article est tiré du livre : La pollution et la mort de l’homme de Francis Schaeffer