L’enfer ne déstabilisera pas le paradis : L’horreur du jugement et la promesse de la joie

Combien d’entre nous, si nous sommes honnêtes, peuvent à peine supporter la pensée du jugement divin ?

Il se peut que nous croyions sincèrement à la Bible et que nous reconnaissions la réalité (et la justesse) de la colère de Dieu et d’un enfer éternel, tout en essayant le plus souvent d’éviter le sujet. D’une certaine manière, nous tolérons le jugement de Dieu, mais notre instinct nous pousse à nous en détourner. Au fond, nous en sommes peut-être un peu gênés. Nous célébrons l’abnégation de Jésus à la croix, mais nous parlons aussi peu que possible de l’enfer, même lorsque nous partageons l’Évangile.

L’idée que nous puissions un jour jouir de la justice et de la puissance de Dieu exposées dans son jugement semble presque impondérable – et encore moins la pensée que nous puissions réellement l’apprécier pour cette raison, même maintenant.

Reconsidérer la colère

Lorsque nous évitons l’enfer, cependant, nous manquons des perspectives plus profondes et plus larges sur la gloire de Dieu. Nous oublions, minimisons ou négligeons des facettes importantes de qui est Dieu.

La colère de Dieu, et la réalité du jugement divin, est l’une des affirmations les plus offensantes du christianisme aujourd’hui. Pourtant, comme l’écrit Tim Keller aux sceptiques, et à nous tous : « Si le christianisme était la vérité, il devrait offenser et corriger votre pensée à certains niveaux. Peut-être est-ce le cas au niveau de la doctrine chrétienne du jugement divin. » (The Reason for God, 73 ; trad. « La raison est pour dieu »).

Et si notre timidité face au jugement divin érodait en fait notre joie en Dieu, au lieu de la préserver ? Des cœurs sains, bien sûr, ne sont pas réconfortés à la perspective de proches non-croyants confrontés à une colère omnipotente pour toute l’éternité. Et pourtant, si nous suivons la révélation que Dieu nous fait de lui-même dans les Écritures, beaucoup d’entre nous trouveront plus de joie, même maintenant, non seulement dans son amour et sa grâce, mais aussi dans sa colère et sa justice. Prenons seulement deux aperçus, parmi d’autres, pour réfléchir à cette possibilité.

Jugement et joie durant l’Exode

Dans Exode 14, le peuple de Dieu était acculé contre la mer Rouge, et ils pouvaient voir l’armée de Pharaon venir pour eux. Ils semblaient pris au piège, et commençaient à éprouver une panique collective. S’adressant à leur grande peur, Moïse a promis : « C’est l’Éternel qui combattra pour vous » (Exode 14.14), et alors que l’armée de Pharaon approchait,

L’ange de Dieu, qui marchait devant le camp d’Israël, quitta cette position et marcha derrière eux, et la colonne de nuée qui les précédait fit de même. Elle se plaça entre le camp des Égyptiens et le camp d’Israël. (Exode 14.19-20)

Dieu, manifestant sa présence dans la colonne, se déplace pour se placer entre son peuple et son ennemi. C’est un acte de guerre. Il s’avance pour protéger les siens. Il se place au milieu. Il dit, en fait : « Je me charge de ce combat. Je vais protéger mon peuple de ses agresseurs. Laissez-moi les Égyptiens. »

LE VAILLANT GUERRIER DIVIN

Puis, après avoir séparé la mer, et alors que les israélites la traversent, avec les Égyptiens à leur poursuite, Dieu met fin à la bataille avec une force terrifiante :

Très tôt le matin, l’Éternel regarda le camp des Égyptiens depuis la colonne de feu et de nuée, et il sema le désordre dans le camp des Égyptiens. Il fit dévier les roues de leurs chars et rendit ainsi leur conduite difficile. Les Égyptiens dirent alors : « Prenons la fuite devant Israël, car l’Éternel combat pour lui contre nous. » (Exode 14.24-25)

Moïse étend la main, les eaux reprennent leur cours normal et Exode 14.27 rapporte : « L’Éternel les [les Égyptiens] précipita au milieu de la mer. » Dieu a en effet combattu pour eux. Il s’est chargé de leur combat. Il a complètement détruit leurs oppresseurs, et ainsi, ils se mettent à chanter pour célébrer leur Dieu, car « il a fait éclater sa gloire » (Exode 15.1). Ils chantent : « L’Éternel est un vaillant guerrier, son nom est l’Éternel » (Exode 15.3).

Exode 14-15 ne sera pas la dernière fois que nous verrons Dieu comme un guerrier divin contre les ennemis de son peuple (voir aussi Deutéronome 1.30 ; 3.22 ; 20.4 ; Josué 23.10 ; 2 Chroniques 20.17 ; 32.8 ; Psaume 35.1 ; Ésaïe 30.32 ; 31.4 ; Zacharie 14.3). Cependant, notez en particulier ici à l’exode : non seulement il est un « vaillant guerrier », mais son peuple le loue pour cela. Ils ne rechignent pas à l’idée. Ils ne sont pas gênés. En fait, ils se délectent de sa colère. Ils chantent. Ils dansent même (Exode 15.20). Pourquoi ? Parce qu’il a détruit leurs oppresseurs.

LA COLÈRE AU SERVICE DE L’AMOUR

Le peuple célèbre l’amour de Dieu (Exode 15.13) – mais pas seulement son amour. Ils célèbrent également sa fureur contre leurs ennemis. Ils bénéficient de la protection de sa colère :

Ta main droite, Éternel, est magnifique de force. Ta main droite, Éternel, a écrasé l’ennemi. Par la grandeur de ta majesté tu renverses tes adversaires. Tu déchaînes ta colère : elle les dévore comme de la paille. (Exode 15.6-7)

Au même moment, dans la même action, le peuple de Dieu est l’objet de son amour immérité, tandis que ses ennemis sont les objets de son jugement bien mérité. La démonstration de la colère de Dieu envers les Égyptiens fait connaître son amour inébranlable envers son peuple. Il peut supporter patiemment leurs mauvais traitements pendant un certain temps, mais à la fin, son amour entraîne l’exécution de la justice contre les méchants. La colère divine sert l’amour divin, et de cette façon, l’amour triomphe.

Jugement et joie à la fin

Nous ne regardons pas seulement en arrière, cependant, vers l’exode, mais aussi en avant vers le jugement final. Plus de sang coule dans les pages de l’Apocalypse que partout ailleurs dans les Écritures. Et pourtant, quelle est la teneur déterminante du peuple de Dieu du début à la fin ? Ils adorent (Apocalypse 4.10 ; 5.14 ; 7.11 ; 11.16 ; et plus encore). Leur joie en Dieu déborde en louanges.

Alors que les jugements horribles de Dieu s’abattent l’un après l’autre sur les méchants, les tourments des damnés ne diminuent pas la joie des saints au ciel. En fait, les jugements de Dieu inspirent les louanges de son peuple. Ils se réjouissent, et se savent bénéficiaires de sa grâce, précisément lorsque sa justice s’abat sur ceux qui persistent dans leur rébellion contre leur Créateur.

Lorsque les nuages se retirent et que nous jetons un coup d’œil au ciel, nous voyons les martyrs crier pour que justice soit faite : « Jusqu’à quand, Maître saint et véritable, tarderas-tu à faire justice et à venger notre sang sur les habitants de la terre ? » (Apocalypse 6.10) Nous entendons un appel angélique à l’adoration « car l’heure de son jugement est venue » (Apocalypse 14.7). Nous entendons encore un autre « chant de Moïse », dans lequel les saints du ciel proclament : « Toutes les nations viendront t’adorer, parce que tes actes de justice ont été révélés. » (Apocalypse 15.4)

UN JUGEMENT CONTRE EUX, POUR VOUS

L’adoration des hôtes célestes loue la justice des jugements de Dieu :

Tu es juste, toi qui es et qui étais, toi le saint, parce que tu as exercé ce jugement. Ils ont versé le sang des saints et des prophètes, et tu leur as donné du sang à boire ; ils le méritent. (Apocalypse 16.5-6)

Les louanges du ciel culminent dans Apocalypse 18 et 19 avec la destruction finale des méchants. Le jugement de Dieu affiche sa puissance pour les yeux de son peuple qui l’adore (Apocalypse 18.8), et la destruction de Babylone convoque ses saints à l’adoration :

Ciel, réjouis-toi à cause d'elle ! Et vous, les saints, les apôtres et les prophètes, réjouissez-vous aussi, car Dieu vous a fait justice en la jugeant. (Apocalypse 18.20)

« Dieu vous a fait justice », est-il dit aux saints. Les jugements divins contre les méchants sont pour vous.

ALLÉLUIA À PROPOS DE L’ENFER

Le moment culminant arrive dans Apocalypse 19.1-6. Ici, au plus fort du jugement de Dieu, son peuple éclate en quatre alléluias (versets 1, 3, 4 et 6) – les quatre seuls dans ce livre à être fixés sur le culte du ciel. Pourquoi des alléluias maintenant ? Le peuple de Dieu le loue pour le jugement par lequel il le sauve :

Alléluia ! Le salut, la gloire et la puissance sont à notre Dieu. Oui, ses jugements sont vrais et justes, car il a jugé la grande prostituée [Babylone] qui corrompait la terre par son immoralité et il a vengé ses serviteurs en lui redemandant leur sang, qu’elle avait versé. (Apocalypse 19.1-2)

Puis, une fois de plus, ils crient « Alléluia ! » et déclarent : « Et la fumée de cette ville s’élève aux siècles des siècles. » (Apocalypse 19.3)

Le jour vient où le peuple de Dieu se réjouira que son jugement soit tombé sur les méchants (voir aussi Psaume 48.11 ; 58.10 ; 96.11-13). Nous saurons alors pleinement ce que nous ne savons et ne ressentons peut-être qu’en partie, pour l’instant.

Qu’en est-il des méchants que nous aimons ?

Savoir que la destruction éternelle des méchants n’encombrera pas, mais en fait attisera notre joie éternelle et toujours croissante en Dieu Tout-Puissant ne signifie pas que nous expérimentons pleinement cette joie maintenant.

Jésus lui-même a pleuré sur la perte de Jérusalem (Matthieu 23.37), et l’apôtre qui connaît ces vérités aussi bien que quiconque a écrit sa « grande tristesse » et son « chagrin continuel » pour ses « propres compatriotes » non-croyants (Romains 9.2-3). Pourtant, dans le même chapitre, il a pu exulter d’émerveillement devant le Dieu qui « voulant montrer sa colère et faire connaître sa puissance, a supporté avec une grande patience des vases de colère tout prêts pour la perdition ? Et que dire s’il a voulu faire connaître la richesse de sa gloire envers des vases de compassion qu’il a d’avance préparés pour la gloire ? » (Romains 9.22-23) Que Paul puisse tenir à la fois une telle tristesse et une telle gloire nous donne un aperçu de ce dont nos âmes peuvent être capables, même dans cette vie.

Les horreurs de l’enfer ne gâcheront pas la joie de l’épouse de Jésus. Et aussi impondérable qu’elle puisse nous paraître maintenant, dans cet entre-deux-âges désorientant, la démonstration décisive et éternelle de la justice et de la puissance de Dieu dans la destruction éternelle des méchants suscitera la louange et la joie du peuple de Dieu.

La joie à la fin – et maintenant

Nous pouvons effectivement trouver une joie éternelle dans le Dieu de la colère éternelle. En fait, nous ne pourrions pas trouver une joie éternelle, toujours plus grande, toujours plus profonde, dans un Dieu qui serait injuste. Au fond de nous, nous savons tous que nous ne voulons pas d’un Dieu qui n’a ni colère ni puissance. Nous ne voulons pas d’un Dieu qui affirme les méchants, ou qui les laisse simplement en place, alors qu’ils montent leur éventuelle attaque contre Dieu et son peuple. En fin de compte, nous ne voulons pas d’un Dieu qui reste les bras croisés et qui n’aime pas suffisamment son peuple pour le protéger du mal.

À la fin, les nuances de gris disparaîtront, et ceux qui sont en dehors de Christ seront révélés pour ce qu’ils sont : des rebelles contre leur Créateur. Des personnes qui détestent le Dieu que nous aimons. Des personnes qui abhorrent le Christ que nous adorons, et son épouse. Il y a une guerre à enjeu pour le cosmos, et nous l’avons ignorée à notre propre péril.

Notre incapacité actuelle à voir comment la destruction éternelle des méchants sera un jour prochain un motif de joie ne signifie pas que nous resterons incapables pour toujours. En fait, nous pouvons grandir et mûrir même en ce siècle. Et ce que nous ne pouvons pas ressentir maintenant, nous le ressentirons assez tôt. Si ce n’est pas ici dans des mesures fraîches et tangibles, alors certainement dans l’âge à venir. Nous ne grimacerons pas. Nous crierons alléluia. Nous n’esquiverons pas la vérité, mais nous nous en délecterons. Nous ne nous demanderons plus comment ces choses peuvent être ainsi. Nous saurons, et nous adorerons.


Cet article est une traduction de l’article anglais «Hell Will Not Unsettle Heaven» du ministère Desiring God par Timothée Davi.