L’enfer est-il vraiment éternel ? Répondre aux objections au châtiment éternel

J’ai presque honte d’admettre qu’un si petit oiseau ait pu être en mesure d’effrayer un homme adulte. Mais dans ce cas, j’avais raison de trembler. L’image dans mon esprit de ce petit oiseau descendant d’en haut, voltigeant d’avant en arrière, sautillant de haut en bas sur l’immensité du sable. Quelle horreur de le voir s’envoler avec un si petit grain pour attendre son retour tant de vies plus tard. Tout cela pour se rappeler que tout cela n’aurait plus d’importance de toute façon.

Thomas Watson a donné cette illustration en prêchant sur le sort de ceux qui ont adoré la bête dans Apocalypse 14.11. On y lit : « La fumée de leur tourment monte aux siècles des siècles et ils n’ont de repos ni jour ni nuit . . . » Cela ne peut être oublié :

Oh, l'éternité ! Si tout le corps de la terre et de la mer était transformé en sable, si tout l'air jusqu'au ciel étoilé n'était que du sable, si un petit oiseau venait tous les mille ans et n'emportait dans son bec que la dixième partie d'un grain de tout ce tas de sable, combien d'années s'écouleraient avant que ce vaste tas de sable ne soit emporté !

Pourtant, si à la fin de tout ce temps, le pécheur pouvait sortir de l’enfer, il y aurait quelque espoir ; mais ces mots « aux siècles des siècles » brisent le cœur. « La fumée de leur tourment monte aux siècles des siècles ».

Après être allé et venu tous les mille ans, emportant un des plus petits grains de l’innombrable quantité de sable, les bannis ne seraient pas plus près de la fin que lorsqu’ils ont commencé. Ces mots qui devraient faire pleurer le plus apathique des impardonnés, faire suer du sang au plus fort, faire se recroqueviller le plus jeune en position fœtale, faire sombrer le plus vieux dans la folie en entendant leurs pas si proches, m’ont secoué. Qui peut les comprendre à juste titre ? Aux siècles des siècles.

Des fantômes lisent par-dessus nos épaules

Mais est-ce vrai ? Ceux qui sont en enfer souffrent-ils d’un châtiment conscient éternel ? L’Église, tout au long de son histoire bimillénaire, a pensé que c’est le cas, mais beaucoup aujourd’hui pensent le contraire.

Et nous ne devrions pas nous demander pourquoi : cela nous concerne personnellement. J’écris en étant parfaitement conscient que le souvenir d’êtres chers décédés dans une apparente incrédulité plane sur les épaules des lecteurs. « Qu’en est-il de lui ? Qu’en est-il d’elle ? » nous nous demandons.

Bien qu’il ait été l’un des premiers évangéliques notables de la génération précédente à contredire la conception historique de l’enfer, nous devons tous adopter la dernière question que John Stott envisage :

Je trouve le concept [de la punition consciente éternelle en enfer] intolérable et je ne comprends pas comment les gens peuvent vivre avec celui-ci sans cautériser leurs sentiments ou craquer sous la pression. Mais nos émotions sont un guide fluctuant et peu fiable de la vérité et ne doivent pas être exaltées à la place d'autorité suprême pour la déterminer. En tant qu'évangéliste engagé, ma question doit être - et est - non pas ce que mon cœur me dit, mais ce que dit la Parole de Dieu.

Et que dit la Parole de Dieu ? Rien de différent de ce que l’Église a majoritairement retenu au cours de ses deux millénaires d’existence.

Trois objections

De tous les sujets qu’il est grossier d’abréger, celui-ci doit être en tête de liste. Beaucoup de choses ont été écrites sur ce sujet qui dépassent le cadre de cet article. Les ressources que j’ai trouvées utiles comprennent Hell Under Fire (trad. L’enfer sous le feu des critiques), la Théologie systématique de Grudem, et quelques chapitres de Gagging of God (13 ; trad. Le bâillonnement de Dieu) et de Que les nations se réjouissent ! (4). Cela dit, j’aimerais donner de brèves réponses aux défis communs à ceux qui croient que les personnes en enfer seront finalement annihilées.

1. Le terme « éternel » signifie-t-il « pour toujours » ?

Les conditionnalistes (ceux qui croient que les impies finiront par cesser d’exister, en se fondant sur le fait que l’âme n’est pas immortelle par nature, mais qu’elle le devient lorsqu’elle remplit certaines conditions, notamment par l’union avec Christ) et les annihilateurs (ceux qui croient que les impies cesseront d’exister parce que, bien que l’âme aurait autrement perduré, Dieu les anéantit finalement lors du jugement) pensent tous deux que l’enfer n’est pas un châtiment sans fin pour les impies.

Pour le prouver, ils soulignent tous deux que le terme « éternel » ne signifie pas toujours « perpétuel ». Ils soutiennent que, tant en hébreu qu’en grec, les mots correspondants que nous traduisons souvent par « éternel » ont l’élasticité nécessaire pour signifier « pour toujours » ainsi que d’autres choses, telles que « l’âge à venir », qui, selon eux, pourrait durer éternellement ou non.

L’une des raisons les plus fortes pour lesquelles cela n’est pas convaincant (sans aller texte par texte) est que certains des passages bibliques en question parlent dans le même souffle à la fois de l’éternité des justes (ce que nous ne remettons pas en question) et de l’éternité des injustes (ce que certains contestent). En d’autres termes, la vie dont jouissent les justes est parallèle au châtiment que subissent les méchants. L’enfer dure aussi longtemps que le paradis.

Par exemple, Daniel parle de ceux qui se réveilleront de la mort : « Beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte, pour l’horreur éternelle. » (Daniel 12.2). Cette idée est reprise dans le Nouveau Testament par Jésus en Matthieu 25 (dont beaucoup pensent qu’il est, à lui seul, décisif en la matière) lorsqu’il enseigne les destins parallèles des justes et des injustes : « Et ils iront à la peine éternelle, tandis que les justes iront à la vie éternelle. » (Matthieu 25.46)

De plus, le livre de l’Apocalypse présente la même chose, en utilisant le langage le plus emphatique que permet le grec pour signifier pour toujours : « aux siècles des siècles » (eis aiōnas aiōnōn), comme dans le texte déjà cité avec le petit oiseau :

Et un autre, un troisième ange, les suivit en disant d'une voix forte : « Si quelqu'un adore la bête et son image et s'il reçoit la marque sur son front ou sur sa main, il boira, lui aussi, du vin de la fureur de Dieu, versé sans mélange dans la coupe de sa colère, et il sera tourmenté dans le feu et le soufre, devant les saints anges et devant l'Agneau. La fumée de leur tourment monte aux siècles des siècles et ils n'ont de repos ni jour ni nuit, ceux qui adorent la bête et son image, et tous ceux qui reçoivent la marque de son nom. » (Apocalypse 14.9-11)

La même description est employée pour décrire la souffrance éternelle de Satan et de ses démons : « Le diable, qui les égarait, fut jeté dans l’étang de feu et de soufre où sont la bête et le prétendu prophète. Et ils seront tourmentés jour et nuit, aux siècles des siècles. » (Apocalypse 20.10) Et ceci, encore une fois, est parallèle au sort des justes plus loin dans le livre : « Il n’y aura plus de nuit et ils n’auront besoin ni de la lumière d’une lampe ni de celle du soleil, parce que le Seigneur Dieu les éclairera. Et ils régneront aux siècles des siècles. » (Apocalypse 22.5) Le ciel et l’enfer cesseront ensemble.

2. Les impies cesseront-ils d’exister ?

L’Écriture emploie souvent des termes tels que « destruction » (Matthieu 10.28), « périr » (Jean 3.16) et « mort » (Apocalypse 20.14) pour décrire le jugement de Dieu sur ceux qui sont en enfer. Ces termes, selon certains, impliquent un anéantissement complet, et non une angoisse permanente. Comme Stott l’a dit de façon mémorable : « Il semblerait étrange . . . si les personnes dont on dit qu’elles souffrent de la destruction ne sont en fait pas détruites ; et comme vous le dites, il est difficile d’imaginer un processus de perdition perpétuellement non concluant. »

D.A. Carson répond : « La conclusion de Stott (“Il semblerait étrange . . . si les personnes dont on dit qu’elles souffrent de la destruction ne sont en fait pas détruites”) est mémorable, mais inutile comme argument, car elle est simplement tautologique : bien sûr, ceux qui souffrent de la destruction sont détruits. Mais il ne s’ensuit pas que ceux qui subissent la destruction cessent d’exister. Stott a assumé sa définition de la “destruction” dans son épigraphe. »

Qu’est-ce que cela signifie alors ? J’ai un membre de ma famille dont la voiture a récemment pris feu et a été complètement détruite. Elle a été détruite et rendue inutilisable. Ils m’ont envoyé une photo de la voiture – son châssis et ses portes étaient encore intacts, mais complètement noirs. Le rétroviseur pendait mollement. Le rétroviseur avant a été incinéré. Le capot avait fondu et les fils et le moteur étaient exposés. Elle était en ruine, mais n’avait pas cessé d’exister.

Mais les méchants ne sont-ils pas décrits comme étant jetés dans le feu – quelque chose qui consume complètement ? Non, car « ils n’auront de repos ni jour ni nuit » (Apocalypse 14.11). Le diable, ses démons et les « enfants de la colère » qui l’ont suivi, comme le buisson ardent et le ver de l’enfer qui ne meurt pas, brûleront sans être consumés. Ils supplieront quiconque voudra bien les écouter de ne donner qu’une goutte d’eau sur leur langue pour soulager leur angoisse des flammes (Luc 16.24), leur « lieu de tourment » (Luc 16.28). « Où il y aura des pleurs et des grincements de dents » (Matthieu 13.50), et non le silence ou le simple rugissement d’un feu.

3. La punition est-elle adaptée au crime ?

Une autre critique, plus philosophique, est qu’il est injuste de mériter une durée infinie de punition pour des péchés finis. La punition n’est pas à la hauteur d’un tel crime, prétend-on.

À cela, nous pouvons répondre comme suit.

Crimes contre le Dieu infini

Un homme peut commettre des crimes si graves contre ses semblables qu’il pourrait être condamné à dix peines de prison à vie pour dix minutes de désordre. Et ce ne sont là que des péchés contre les hommes. L’idée de pécher contre Dieu – et pas seulement en un instant, mais pour toute sa vie – ne peut-elle pas mériter la damnation éternelle alors qu’un seul péché a justement plongé le monde dans la mort et les ténèbres ?

Edwards est souvent cité comme argumentant en ce sens. John Piper résume : « L’essentiel est que les degrés de culpabilité ne viennent pas de la durée de l’offense à la dignité, mais de la hauteur de la dignité que vous offensez. » (Que les nations se réjouissent !, 127). Nous péchons contre un Dieu infiniment digne d’obéissance, infini en gloire, infini en pureté. Aucune dignité n’est plus haute et aucune transgression plus vile. Il est très révélateur que nous voyions plus de problèmes avec la punition qu’avec le crime.

Des péchés éternels ?

Une autre raison pour laquelle cela est juste est qu’il y a de bonnes raisons de comprendre les péchés comme étant éternels, dans au moins deux sens.

Premièrement, Jésus a parlé d’un péché éternel (et non fini, limité) (Marc 3.29), un péché qui « ne sera pardonné ni dans ce siècle ni dans le siècle à venir. » (Matthieu 12.32). Et les péchés qui ne sont pas explicitement nommés comme étant ce péché éternel, entraînent une destruction éternelle (2 Thessaloniciens 1.9), un jugement éternel (Hébreux 6.2), un châtiment éternel (Matthieu 25.46) et un feu éternel (Matthieu 25.41), ce qui met à mal nos catégories finies.

Deuxièmement, les péchés des damnés peuvent être éternels dans la mesure où les pécheurs continuent à pécher pendant l’éternité. John Stott a admis que le châtiment conscient éternel serait beaucoup plus sensé pour lui si « peut-être (comme on l’a soutenu) l’impénitence des perdus se poursuit également pendant l’éternité. »

Deux textes semblent l’indiquer. Le premier, Apocalypse 22.11 : « Que celui qui est injuste commette encore des injustices et que celui qui est sale se salisse encore, mais que le juste pratique encore la justice et que celui qui est saint progresse encore dans la sainteté. » Si les saints pratiquent la sainteté dans l’attente de continuer dans la sainteté parfaite, les impies ne continueront-ils pas à s’enfoncer dans le mal pendant toute l’éternité ? Aimeront-ils soudain Dieu de toute leur âme en enfer ?

La réponse est assez claire dans Apocalypse 16.8-11, où les personnes soumises au jugement de Dieu « se mordaient la langue de douleur, et ils blasphémèrent le Dieu du ciel à cause de leurs douleurs et de leurs ulcères, ils ne se repentirent pas de leurs actes ».

Ne devraient-ils pas être relâchés ?

Résolument offensif, Carson pose la question qui s’impose : « On peut raisonnablement se demander pourquoi, si les gens paient leurs péchés en enfer avant d’être annihilés, ils ne peuvent pas être relâchés au paradis, transformant l’enfer en purgatoire. Alternativement, si les péchés n’ont pas encore été payés, pourquoi devraient-ils être annihilés ? »

Le roi qui a vidé le désert

Un oiseau ne pourrait pas, par l’enlèvement minutieux d’un monde plein de sable, nous rapprocher un peu plus de l’éternité avec Dieu. Le temps ne réparera pas toutes les blessures, ni n’arrêtera le juste châtiment de Dieu. La mort ne cachera pas non plus les méchants, bien qu’ils cherchent l’anéantissement, appelant les montagnes à les écraser pour les cacher de la colère de Christ (Apocalypse 6.15-17).

Mais ce qu’un petit oiseau n’a pu accomplir, un Agneau l’a fait.

Au sommet de son angoisse, il s’est écrié : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » afin que ceux qui se repentent et croient en lui ne subissent pas « une ruine éternelle, loin de la présence du Seigneur et de la gloire de sa force » (2 Thessaloniciens 1.9). C’est ici seulement que la coupe du jugement éternel peut être vidée en faveur des pécheurs. Il est possible d’échapper au châtiment éternel.

Bien que nous ressentions à juste titre une angoisse incessante et une grande tristesse pour ceux qui ne se cachent jamais sous la croix de ce côté-ci de l’éternité (Romains 9.1-3), même cette angoisse ne durera pas. Nous célébrerons à jamais l’éternel triomphe de Dieu sur le mal : « Ils dirent une seconde fois : “Alléluia ! Et la fumée de cette ville s’élève aux siècles des siècles.” » (Apocalypse 19.3) Jésus-Christ notre Sauveur est digne de louanges éternelles parce qu’il a enduré, pour nous, le juste jugement qui aurait été le nôtre pour l’éternité.


Cet article est une traduction de l’article anglais « Will Hell Really Last Forever? » du ministère Desiring God par Timothée Davi.