La Réforme et ses critiques (Douglas Wilson)

La Réforme a été une grande œuvre du Saint-Esprit de Dieu, et c’était le bazar, un bazar royal. Est-ce un problème ?

L’un des problèmes que nous rencontrons lorsque nous nous rappelons et apprécions les grands événements du passé – ce que nous devrions bien sûr faire – est qu’un certain nombre de ces détails désagréables disparaissent et sont oubliés. Cela signifie que lorsque nous prions pour le retour d’une telle bonté – une intervention divine, un réveil, une réforme – nous avons souvent une vision très déformée de ce que nous demandons réellement. Les réformes ne sont jamais accomplies au son des applaudissements polis du public en arrière-plan.

Quand les critiques triplent

Il existe de nombreux exemples de ce principe – allant de la présence de sueur au besoin palpable de courage – mais je voudrais me concentrer sur un aspect particulier.  Ceux qui peinent à amener une réforme, ceux qui prient pour que Dieu nous accorde un grand réveil, font souvent leur travail préparatoire face à de grandes critiques. Souvent, les critiques sont très compétents et leurs arguments sont convaincants. Ceux qui travaillent pour qu’une réforme aboutisse sont parfois tentés de redoubler d’efforts, sans parler de leurs prières, dans la conviction que l’arrivée d’une grande réforme leur donnerait enfin raison face à leurs critiques. Il est plus probable qu’elle triplerait le nombre de leurs critiques. Les critiques ne disparaissent pas tant que le réformateur n’est pas mort depuis un certain nombre d’années, et qu’il est temps de polir son héritage.

Jésus a parlé de ce phénomène. Nous savons que nous devons honorer les grands hommes d’autrefois parce que nous avons vu leurs tombes et leurs monuments (Matthieu 23.29-32). Nous ne voyons pas la foule rassemblée devant la maison de ce prophète à l’époque, avec le chef de la foule brandissant une corde de manière menaçante, et nous ne voyons certainement pas l’arrière-arrière-petit-fils de ce chef de la foule comme le candidat le plus probable pour être le président du conseil d’administration de la société historique dédiée à la préservation du mausolée du grand prophète qui, à un moment donné, a marché parmi nous.

Le ravage de l’Histoire

Les critiques de la réforme sont ainsi parce que la réforme n’a pas encore porté ses fruits. Une fois que ce sera le cas, ils se retrancheront derrière les acquis de cette réforme pour la manipuler très efficacement à leurs propres fins et pour mettre en échec la prochaine réforme.

Je me suis parfois amusé à imaginer ce qui se passerait si de grands hommes voyageaient dans le temps pour visiter les institutions qui portent leur nom. Beaucoup de ces expériences mentales se terminent par des meubles jonchant le sol des salles d’attente, du verre brisé et des sirènes de police en arrière-plan. Et si vous doutez de la possibilité d’un véritable ravage – car cela ne semble pas aussi pieux que nous le souhaiterions – réfléchissez à ce qui s’est passé lorsque Jésus, le nom de Dieu, est apparu à l’endroit où Dieu a fait habiter son nom (Deutéronome 12.11). D’abord il a fait un fouet, puis il a fait un vacarme.

La nature de la tâche

Les conservateurs de la présence prophétique la préfèrent de loin lorsque leurs prophètes sont décédés, et lorsqu’ils sont décédés depuis une génération ou plus, ils sortent complètement de la zone de critique. Deux générations plus tard, il n’est plus possible de les critiquer. Mais ceux qui préparent la voie aux réformes ont une tâche ingrate et sont régulièrement confrontés à un barrage de critiques. Ils s’en lassent parfois et en viennent à croire que l’une des premières choses qui se produirait (si l’Esprit agissait dans la réforme) est que tous leurs anciens critiques se taperaient sur le front et diraient : « Oh ! tout cela n’était en fait qu’un travail de préparation pour une grande réforme ! » Comme un grand essayiste l’a dit un jour – je crois que c’était Montaigne – « n’espérez pas trop ».

Ne vous méprenez pas sur ce que je veux dire. Il y a des conversions. Certains esprits et cœurs sont changés, et de merveilleuses transformations se produisent. Des critiques deviennent des défenseurs, et des persécuteurs deviennent des apôtres. Mais cela ne réduit généralement pas le nombre total de critiques, car le diable les garde dans un entrepôt à proximité. Il en a toujours une réserve prête à l’emploi.

Ainsi, lorsque vous commencez à recevoir beaucoup de critiques, la seule chose que cela devrait vous indiquer est que vous êtes sur la cible. Ce n’est pas un signe que tout va mal. Cela fait partie de la nature même de la tâche.


Cet article est une traduction de l’article anglais « Reformation and the Critics » du ministère Desiring God par Timothée Davi.