5 façons de faire en sorte que nos âmes ne soient pas étranglées par les écrans (Kevin DeYoung)

1. Cultivez une saine méfiance à l’égard de la technologie et du « progrès ».

La technologie améliorait notre vie de plusieurs façons. Je ne vous recommanderai donc pas de renoncer à quoi que ce soit doté d’un bouton marche-arrêt. Néanmoins, nous pourrions très bien vivre en prenant un peu de « distance » par rapport à la technologie, en étant un peu plus conscients que la vie existait avant les dernières inventions et qu’elle peut exister sans elles. L’avertissement de Neil Postman est empreint de sagesse : la technologie « ne doit jamais faire partie de l’ordre naturel des choses ». Nous devons comprendre que « toute forme de technologie — qu’il s’agisse d’un test de QI, d’une automobile, d’un téléviseur ou d’un ordinateur — est le produit d’un contexte économique et politique particulier, qui est également lié à un programme, à un but et à une philosophie qui peuvent ou non améliorer notre vie et qui exigent donc d’être examinés, critiqués et maîtrisés[1] ».

2. Être plus prévenants et compréhensifs dans nos relations avec les autres.

J’ai remarqué récemment qu’un de mes amis, après m’avoir envoyé des courriers électroniques très concis, insérait un lien à la fin de ses messages. Ce lien renvoyait à une « charte des courriels ». Je l’ai ignoré pendant plusieurs semaines (trop occupé !), mais ma curiosité l’a finalement emporté et j’ai cliqué sur ce lien. À ma grande surprise, cette « charte » offrait de précieux conseils pour passer moins de temps à envoyer et à recevoir des courriers électroniques. Par exemple, ne pas poser de questions ouvertes, ne pas envoyer de réponses vides de contenu, ne pas envoyer le message à plusieurs personnes à la fois sans raison valable, ne pas s’attendre à une réponse immédiate. C’est incroyable de voir à quel point je suis impatient. J’envoie un texto à quelqu’un et je m’attends à recevoir une réponse dans les secondes qui suivent. Si j’envoie un courriel, je suis prêt à attendre quelques heures, mais avec mes amis, je m’attends à une réponse dans les minutes qui suivent. Il est impossible de réduire l’affairement sans faire un effort collectif. Nous ne devons pas considérer les réponses tardives ou courtes comme étant impolies. Nous ne devons pas nous attendre à ce que les gens se tournent vers nous à la moindre tape sur l’épaule.

3. Utiliser volontairement « l’ancienne » technologie.

Si vous ne voulez pas dépendre de vos gadgets électroniques, faites l’effort de vous débrouiller sans les utiliser. Lisez un livre papier. Écrivez une lettre à la main. Achetez un beau stylo. Téléphonez à l’un de vos amis. Cherchez un mot dans le dictionnaire. Conduisez sans écouter la radio et sans brancher votre iPod. Allez courir sans musique. Allez faire des achats dans un vrai magasin. Le but n’est pas d’être original, mais de renouer avec quelques activités qui sont plus agréables « à l’ancienne ».


Parce que nous comprenons notre valeur en tant que porteurs d’image et notre identité en tant qu’enfants de Dieu, nous ne nous tournerons pas vers internet pour prouver que nous sommes importants, précieux et aimés.


4. Se fixer des limites et être prêts à se battre pour les respecter.

Le moyen le plus simple de mettre fin à la tyrannie de l’écran est aussi le plus difficile : se déconnecter de temps à autre. Nous devons arrêter d’apporter notre téléphone au lit. Nous ne pouvons aller sur Facebook lorsque nous sommes à l’église. Nous ne pouvons envoyer des textos pendant chaque repas. L’an dernier, ma femme et moi avons connu l’une de nos plus grosses disputes parce qu’elle m’a vivement reproché de m’être mis à écrire sur Twitter alors que j’étais à table. Elle avait tout à fait raison de réagir ainsi, et je lui ai promis de ne jamais recommencer (je crois avoir tenu ma promesse).

Ce ne serait pas une mauvaise idée que les familles aient un beau grand panier où l’on déposerait tous les téléphones, toutes les tablettes et tous les ordinateurs portables pendant quelques heures tous les jours (à l’heure du dîner ? pendant le temps de communion avec Dieu ? à l’heure du coucher ? lorsque papa rentre à la maison ?). Beaucoup d’entre nous auraient dû depuis longtemps observer un sabbat de l’écran, ne serait-ce que pour une partie de la journée (ou toute la journée !), au cours duquel ils n’auraient été ni « connectés » ni assis devant un appareil électronique. Il serait sans doute bénéfique de nous affranchir de la fâcheuse habitude qui nous pousse à commencer et à terminer chaque journée en vérifiant nos appels téléphoniques. De toutes les mauvaises habitudes qui font de moi un homme occupé, la pire est sans doute celle qui consiste à vérifier ma boîte de courrier électronique juste avant d’aller dormir et dès mon réveil.

5. Vaincre les menaces de l’ère numérique à l’aide de la Parole de Dieu.

Le gros bon sens s’avère souvent utile, certes. Or, les problèmes les plus profonds ne peuvent être résolus que par les vérités les plus profondes. La doctrine de la création nous enseigne que les objets créés par les hommes peuvent être employés à la fois pour leur bien et la gloire de Dieu. Ainsi, les nouvelles technologies n’ont pas à être systématiquement disqualifiées. Puisque notre Dieu nous a choisis dès l’éternité passée et que pour lui, un jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour, nous ne nous enticherons pas de la dernière mode et des nouvelles tendances. À cause de l’incarnation, nous savons que rien ne remplace le concret, les personnes réelles et les endroits physiques. Ainsi, nous ne considérons pas les rencontres virtuelles comme des substituts adéquats aux relations humaines, en chair et en os.

De même, puisque nous connaissons notre valeur en tant que porteurs de l’image de Dieu et en tant qu’enfants de Dieu, nous ne nous attendrons pas à ce qu’Internet détermine notre importance et notre valeur, et nous dise à quel point nous sommes aimés. Puisque nous avons conscience de la présence du péché, nous serons en mesure de reconnaître les idoles potentielles ainsi que les tentations auxquelles nous pourrions succomber. Étant donné que nous sommes conscients de notre nature pécheresse, nous reconnaîtrons les limites de notre condition humaine. Il est impossible d’entretenir une relation profonde avec des milliers de personnes. De toute évidence, il est impossible de savoir tout ce qui se passe dans le monde. Il est impossible d’être à plusieurs endroits en même temps. Le plus grand mensonge lié à l’ère numérique est probablement celui qui veut nous faire croire que nous pouvons tout faire, tout savoir et être partout à la fois. Toutes ces choses sont impossibles. Nous devons choisir où nous ne serons pas, ce que nous serons incapables de faire et ce que nous ne saurons pas — nous devons choisir avec sagesse. Plus vite nous accepterons nos limites, plus vite nous serons libres.

Notes :

[1] Neil Postman, Technopoly : The Surrender of Culture to Technology [Technopole : l’asservissement de la culture à la technologie], trad. libre, New York, Vintage, 1993, p. 184-185.


Cet article est adapté du livre : « Vie de fou » de Kevin DeYoung